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Voici quatre petits articles rédigés pour Trad magazine en 2009. Les deux premiers ont été publiés mais pas les deux derniers. Je les remets donc tous les quatre ici...
Dix huit années après la rédaction de sa première chronique, Jean-Luc Matte jette l'éponge et nous livre ici ses réflexions sur ce sujet souvent controversé.
Fin 1990, ayant ramené l'intéressante K7 d'un groupe sorabe rencontré au festival de Strakonice, en ce qui était encore la Tchécoslovaquie, il me semble dommage de ne pas la faire connaître par chez nous. Je l'ai déjà écoutée de nombreuses fois, mais lorsque je m'attaque à la page blanche, des souvenirs de rédaction scolaire me reviennent à l'esprit… Et oui ! Entre le fait d'apprécier un enregistrement et celui d'en tirer un texte susceptible d'intéresser des lecteurs il y a un fossé à franchir… Et je passe donc plus d'une soirée à tourner et retourner les phrases de cette première critique… qui ne me satisfait jamais et qui aboutit donc… à la corbeille. Ma première chronique publiée dans Trad. Mag (1) est finalement celle d'un livre : celui de Per Ulf Allmo sur la cornemuse en Scandinavie qui demeure aujourd'hui encore la bible sur ce sujet et pour lequel je n'aurai pu me résoudre à ce que Trad. Mag. n'en fasse pas mention. J'envoie donc ma bafouille à cette revue qui a déjà, à l'époque, publié un article de ma plume, et celle-ci paraît relativement rapidement. Les chroniques suivantes auront la même genèse : des livres et CDs achetés sur des festivals étrangers (bien que je n'ai malheureusement pas vraiment eu le loisir de beaucoup voyager) ou, plus souvent, à des groupes étrangers de passage par chez nous. Toujours la même motivation : faire connaître en France l'existence de tous ces ouvrages et enregistrements qui n'y sont pas distribués. Rapidement, je tente l'envoi d'une copie de l'une ou l'autre chronique publiée, à l'éditeur concerné et certains jugent apparemment que ces publications, même si elles émanent d'un pays où ils ne sont pas distribués, valent bien l'envoi d'un exemplaire de leurs nouveautés. Ils espèrent d'ailleurs sans doute que cela puisse leur offrir l'opportunité de trouver un distributeur et c'est un espoir que je partage avec eux. C'est d'ailleurs ceci qui me motive à chroniquer pas mal de CD espagnols, constatant que ne sont importés chez nous quasiment que ceux relevant du Flamenco et, parmi les CDs galiciens ou asturiens, presque uniquement ceux relevant du revivalisme aux couleurs pan-celtiques, donnant une image bien partielle et faussée des traditions musicales de ces régions. Après avoir accepté de publier mes chroniques, la rédaction de Trad. Mag. commence à m'envoyer quelques CDs et je me retrouve progressivement en charge des chroniques de CDs espagnols, italiens, quelquefois allemands et parfois encore d'autres origineslorsqu'ils présentent une forte coloration cornemuse.
La part des CDs reçus par la rédaction est toujours à peu près égale à celle de ceux démarchés auprès des labels étrangers. L'avantage de solliciter soi-même les éditeurs étant de faire un choix parmi ceux-ci et de recevoir, de ce fait, prioritairement des CDs que l'on a toutes les chances d'apprécier.
Si je vous ai retracé ce petit historique, c'est afin de bien préciser que je ne me suis jamais autoproclamé " critique de disques, spécialisé en musiques traditionnelles " mais que tout cela s'est fait de manière progressive, avec la seule motivation de partager des coups de cœur, de faire connaître ce qui l'était peu ou mal, de rétablir une certaine vérité dans la perception des musiques de certaines régions dont les imports répondent à des critères plus commerciaux que réellement culturels. Et je suis persuadé de ne pas être le seul dans ce cas au sein de Trad Magazine…
Ayant par la suite l'envie de diversifier ces domaines géographiques et de soutenir également les productions franco-belges, je rédigerai des chroniques dans d'autres colonnes, à raison d'une ou deux par semaine. (2)
Devenu chroniqueur presque sans le vouloir réellement, j'ai d'ailleurs toujours eu quelques complexes vis-à-vis de mes compétences réelles en la matière : si j'ai fait de l'allemand à l'école, je n'ai jamais étudié ni l'espagnol ni l'italien mais heureusement, ces langues latines se laissent tout de même facilement comprendre, tout du moins à l'écrit. Il n'empêche que je ne suis guère en mesure d'apprécier que la musique de ces langues et non la richesse de leurs textes, hormis en lisant les livrets, c'est-à-dire de manière dissociée de leur mise en musique ce qui est forcément réducteur. Instrumentiste mais n'ayant jamais fait de solfège, mes compétences théoriques en matière d'analyse musicale et dans le domaine de l'harmonie en particulier sont tout à fait minimes et je n'ai jamais cherché à donner le change là-dessus. Quant-à la connaissance des traditions dont étaient issues les différentes musiques, elle n'est naturellement pas innée et j'ai toujours essayé de me documenter (en commençant, naturellement, par chercher sur un atlas où se situaient les villages d'où provenaient les enregistrements...). Il me reste, heureusement, une connaissance et, surtout, une passion, pour les instruments de musique, un goût affirmé pour les timbres de voix traditionnels, les rythmes à danser, les musiques acoustiques etc.. Sans oublier la lecture intégrale de toutes les chroniques de mes confrères (j'évite, par contre toujours, de lire dans d'autres revues les chroniques de CDs que j'ai à chroniquer, tout du moins avant de les avoir rédigées…) Et, heureusement, quelques avis en retour m'ont rassuré sur le ressenti des lecteurs, et parfois des musiciens concernés, sur ces bafouilles.
Au risque de me répéter, la rédaction d'une chronique est, comme celle de tout article, une nouvelle aventure. Bien entendu cela débute par plusieurs écoutes, si possible dans des conditions différentes (au casque, dans son salon, en voiture…seul ou non….) qui offriront chacune un angle d'attaque différent. La lecture du livret est indispensable lorsqu'il s'agit d'un CD de type document (collectages ou assimilé…). Pour les groupes actuels, par contre, je ne lis les présentations et livrets qu'après les premières écoutes, afin de me faire une première opinion objective et non influencée par les arguments théoriques des musiciens. Si quelques notes sur le papier aident à retenir les points à signaler dans la chronique, ceux-ci sont, plus souvent, simplement mémorisés. Mais dans ce cas il est déconseillé de chercher à conduire plusieurs chroniques en même temps : le risque de confusion étant trop important…
Et puis il faut bien se mettre face à la page blanche (celle de " Nouveau document " sur le traitement de texte) et trouver comment agencer tout cela, par quel bout commencer, sur quelle touche finir et si possible quel aspect original souligner, soit dans le contenu du CD, soit dans l'approche que je pourrai en faire. Et puis ne pas oublier que le rédacteur en chef nous presse de ne pas dépasser les 1000 signes (blancs compris !) et qu'il faudra donc laisser de côté certains points, de même que ceux qui ne trouveront pas leur place dans l'enchaînement logique des phrases de ce texte qui, malgré sa brièveté, doit toujours s'appuyer sur un plan.
Dans le prochain numéro nous attaquerons le sujet qui fâche : nos chroniques sont-elles trop complaisantes ?
(1) Trad Magazine n°14 janv-fev 1991
(2) dans ma lettre électronique " Infosmumuses " dont l'aventure s'est achevée en juin 2009 après 9 ans de publication hebdomadaire.
Il est courant d'entendre dire que les chroniques de Trad. magazine sont toujours favorables, jamais vraiment critiques (elles sont d'ailleurs dénommées chroniques et non critiques…). Serions nous dénués de véritable sens critique ou tout simplement trop timorés pour attaquer de front tel ou tel musicien ? Cette mansuétude dont on nous accuse n'est certes pas tout à fait imaginaire, mais elle s'explique et se justifie, au moins en partie, par d'autres arguments. Comme vous l'avez remarqué, les signatures sont nombreuses dans cette rubrique (heureusement, car qui pourrait assurer l'écriture d'une centaine de billets tous les deux mois…) et chacun a, plus ou moins, son domaine ou plutôt sa zone de passion, qu'il souhaite partager avec les lecteurs. Dans des secteurs grand public où la production est forte voire pléthorique (littérature, cinéma etc…) et où les choix de publications sont souvent commerciaux, partager sa passion signifie souvent dénigrer les productions que l'on estime injustifiées, mais il en va tout autrement dans un domaine nettement plus restreint, comme le nötre, où chaque groupe, chaque producteur a mis toute son énergie, voire ses finances pour éditer un CD auquel il croît sincèrement.
D'un strict point de vue littéraire, il est plus facile de rédiger une critique saignante qu'un papier dithyrambique : ne paraît-on pas toujours plus sincère lorsque l'on pique une colère que lorsque l'on dit du bien de quelqu'un (malheureusement). Prenez n'importe quelle chronique favorable, remplacez simplement tous les qualificatifs par leurs contraires et vous obtiendrez un texte qui paraîtra bien plus spirituel. Même les jeux de mots semblent moins gratuits et bien plus pertinents lorsqu'ils agrémentent une satire plutôt qu'une déclaration d'amour… Et puis, rédiger une chronique en termes très tranchés laisse penser que le rédacteur a du caractère.
Mais revenons-en à notre écurie de critiques spécialisés : qu'ils se procurent eux-mêmes leur CDs ou que la rédaction (qui sait très bien ce qu'elle fait) leur envoie, il y a toutes les chances que les CDs en question fassent partie de l'univers de prédilection de chacun d'eux et comment voudriez-vous qu'ils ne cherchent pas à vous faire partager leur goût pour ces musiques, plutôt que de faire la fine bouche sur tel ou tel point qui aurait pu être un peu plus ceci ou cela…
Et lorsqu'un CD ne nous émeut guère, il n'est guère besoin de s'appesantir en critiques pour que le lecteur le perçoive et, comme nous le rappelle le rédacteur en chef, il n'est même pas besoin de perdre de la place pour en faire état : autant consacrer nos colonnes à ceux qui en valent la peine… Il m'est, par contre, arrivé plusieurs fois de transmettre à un confrère un CD que je jugeait de qualité mais qui ne me parlait pas et dont je pensais qu'il accrocherait davantage son nouveau destinataire.
Il faut bien reconnaître également que notre petit monde trad. n'est pas du tout habitué à s'entredéchirer à coup de critiques, sans doute pour les raisons évoquées ci-dessus et qui tiennent à une certaine fragilité ressentie tant envers les musiciens professionnels qu'amateurs. De ce fait, toute critique un tant soit peu acerbe (voire moins) ne manque pas de solliciter immédiatement un tollé et ce n'est pas seulement l'artiste qui vous en voudra à vie, mais également tous ceux qui l'apprécient, voire toute sa région. On a connu des chroniqueurs interdits de séjour dans une région entière pour cause de chronique trop tiède, voire d'une phrase mal ressentie… Ce sont d'ailleurs souvent les mêmes qui déplorent l'absence de chroniques saignantes et qui acceptent le moins les critiques lorsque cela les concerne.
Mais la question doit-elle finalement se poser en terme de dualité bon-mauvais ? La revue nous imposant de fournir un jugement de valeur sous la forme Bravo, recommandé ou chronique simple (et désormais de manière encore plus explicite sous forme de T plus ou moins nombreux), il nous devient plus facile d'évacuer cet aspect personnel et subjectif et de se concentrer sur les autres fonctions de la chronique : essayer de faire comprendre au lecteur le type de contenu du CD afin que celui-ci puisse se faire une première idée sur l'intérêt potentiel qu'il peut y porter et, plus intéressant (1), aller au-delà de cet aspect simplement descriptif en tentant d'amener le lecteur à s'intéresser à cet enregistrement, à enrichir ainsi son univers musical, quitte parfois à en repousser un peu les limites habituelles. Et puis, enfin, parce que le lecteur n'a pas forcément besoin de vous pour se décider à écouter tel ou tel CD ou lire tel ouvrage, simplement faire partager un ressenti forcément personnel et dans lequel le lecteur pourra prendre plaisir soit à retrouver des éléments du sien, soit à en découvrir un différent.
(1) d'autant qu'aujourd'hui, internet permet facilement d'aller écouter soi-même des extraits
L'une des difficultés de la lecture des chroniques de Trad. magazine tient à la multiplicité des signatures. La bonne compréhension d'une chronique passe en effet par la prise en compte du caractère et des goûts de son auteur, éléments que le lecteur peut tirer de la connaissance directe de cette personne ou encore de ses autres activités musicales (lorsqu'Eric Montbel signe la chronique du CD d'Ivan Karvaix par exemple), mais qui se livre surtout au travers de la lecture habituelle de ses chroniques. Afin de vous aider à vous y retrouver, je vous propose cette petite typologie des chroniques, à ne pas prendre trop au sérieux mais que vous pourrez même tenter d'appliquer à d'autres domaines :
- la chronique carte d'identité : sans se mouiller, elle s'attache surtout à citer tous les musiciens présents et leurs instruments, - la chronique arbre généalogique : elle va plus loin que la précédente en rappelant l'histoire du groupe, ses changements de musiciens, voire les différents ensembles dont ceux-ci sont issus, - la chronique palmarès : elle récapitule tous les titres de gloire du groupe ou des musiciens (trophées, passages dans les grands festivals, collaborations prestigieuses…) - la chronique copieur : elle tire tout son contenu du livret, de la doc envoyée avec le CD ou encore du site internet officiel du groupe. Se dissimule souvent sous l'une des trois catégories précédentes. - la chronique play-list : elle liste soigneusement les différentes plages, de préférence dans l'ordre chronologique - la chronique ethnomusicocenseur : son étalon est la pratique traditionnelle authentique, ou plutôt, celle dont l'auteur suppose l'existence. Il s'attachera donc à mesurer l'écart à cette "référence", à juger du degré de folklorisation, de revivalisme, à pointer le nombre de compositions. - la chronique folkeux nostalgique : ce n'est finalement qu'une variante de la précédente, au gros détail près que l'étalon est, cette fois, la pratique revivaliste des années 70. - la chronique musicologique : elle dissèque et analyse la partition, les harmonies et arrangements : très rare dans Trad. Mag. mais les lecteurs sont-ils vraiment demandeurs ? - la chronique du danseur : ce qui l'intéresse c'est de savoir si cela se danse ou pas, un point c'est tout ! Reste ensuite à savoir ce que signifie " dansable " ou " pas dansable " selon le type de danseur, ce qui peut engendrer, par exemple, un débat sur la destructuration de la danse (1) - la chronique tribune : l'œuvre chroniqué n'est qu'un prétexte à mettre en avant les idées personnelles du chroniqueur sur tel ou tel sujet - la chronique hors sujet : variante de la précédente où l'œuvre n'est plus prétexte à discours militant mais simplement à évoquer un sujet ayant un lien proche ou lointain avec l'œuvre dont il était censé être question - la chronique moi je : cas particulier de la précédente : le sujet de dissertation en question est l'auteur de la chronique lui-même, ses œuvres ou celles de ses proches… - la chronique littéraire : c'est un exercice de style qui use et abuse souvent du calembour dans un registre généralement non humoristique - la chronique branchouille : pour faire sens, elle cherche à marquer un différentiel avec la gouvernance. - la chronique freestyle : variante de la précédente, elle ne se nourrit pas des derniers termes français mais plutôt avec les derniers mots anglais à la mode (…ou les avant-derniers… ou ceux d'avant…) - la chronique exotique : celle qui vous cite les microrégions d'un pays que vous ne situez même pas sur la carte, les noms de musiciens dont vous ne parvenez même pas à imaginer la prononciation… - la chronique poétique : elle ne parle ni des musiciens ni de leurs instruments ou du répertoire mais décrit les images que leur musique génère. - la chronique distraite : elle confond tel musicien avec son frère, la vielle et la vièle, l'île d'Arran (Ecosse) avec les îles d'Aran (Irlande)… - la chronique graphiste : le chroniqueur a oublié qu'il y a un CD dans la pochette et ne s'intéresse qu'à l'esthétique de celle-ci. - la chronique hifi : elle ne prête pas attention aux mélodies, aux paroles des chansons ou aux harmonies, mais au rendu des basses dans le salon, à la séparation des canaux, à la présence de ronflettes… : rare dans Trad. mag. : les chroniqueurs n'ont pas les moyens de s'offrir le matériel d'écoute ad hoc… - la chronique règlement de compte : peu fréquente dans Trad. Mag non plus, elle est surtout l'apanage des revues plus scientifiques et s'applique surtout aux livres : le chroniqueur (généralement de l'école adverse, naturellement) refait toute l'étude pour démontrer que celle dont il est question ne vaut rien. - la chronique plagiat : c'est l'inverse de la précédente, l'auteur semble tellement convaincu de ce qu'il a lu qu'il en reprend le résumé à son compte…
- la chronique carte d'identité : sans se mouiller, elle s'attache surtout à citer tous les musiciens présents et leurs instruments,
- la chronique arbre généalogique : elle va plus loin que la précédente en rappelant l'histoire du groupe, ses changements de musiciens, voire les différents ensembles dont ceux-ci sont issus,
- la chronique palmarès : elle récapitule tous les titres de gloire du groupe ou des musiciens (trophées, passages dans les grands festivals, collaborations prestigieuses…)
- la chronique copieur : elle tire tout son contenu du livret, de la doc envoyée avec le CD ou encore du site internet officiel du groupe. Se dissimule souvent sous l'une des trois catégories précédentes.
- la chronique play-list : elle liste soigneusement les différentes plages, de préférence dans l'ordre chronologique
- la chronique ethnomusicocenseur : son étalon est la pratique traditionnelle authentique, ou plutôt, celle dont l'auteur suppose l'existence. Il s'attachera donc à mesurer l'écart à cette "référence", à juger du degré de folklorisation, de revivalisme, à pointer le nombre de compositions.
- la chronique folkeux nostalgique : ce n'est finalement qu'une variante de la précédente, au gros détail près que l'étalon est, cette fois, la pratique revivaliste des années 70.
- la chronique musicologique : elle dissèque et analyse la partition, les harmonies et arrangements : très rare dans Trad. Mag. mais les lecteurs sont-ils vraiment demandeurs ?
- la chronique du danseur : ce qui l'intéresse c'est de savoir si cela se danse ou pas, un point c'est tout ! Reste ensuite à savoir ce que signifie " dansable " ou " pas dansable " selon le type de danseur, ce qui peut engendrer, par exemple, un débat sur la destructuration de la danse (1)
- la chronique tribune : l'œuvre chroniqué n'est qu'un prétexte à mettre en avant les idées personnelles du chroniqueur sur tel ou tel sujet
- la chronique hors sujet : variante de la précédente où l'œuvre n'est plus prétexte à discours militant mais simplement à évoquer un sujet ayant un lien proche ou lointain avec l'œuvre dont il était censé être question
- la chronique moi je : cas particulier de la précédente : le sujet de dissertation en question est l'auteur de la chronique lui-même, ses œuvres ou celles de ses proches…
- la chronique littéraire : c'est un exercice de style qui use et abuse souvent du calembour dans un registre généralement non humoristique
- la chronique branchouille : pour faire sens, elle cherche à marquer un différentiel avec la gouvernance.
- la chronique freestyle : variante de la précédente, elle ne se nourrit pas des derniers termes français mais plutôt avec les derniers mots anglais à la mode (…ou les avant-derniers… ou ceux d'avant…)
- la chronique exotique : celle qui vous cite les microrégions d'un pays que vous ne situez même pas sur la carte, les noms de musiciens dont vous ne parvenez même pas à imaginer la prononciation…
- la chronique poétique : elle ne parle ni des musiciens ni de leurs instruments ou du répertoire mais décrit les images que leur musique génère.
- la chronique distraite : elle confond tel musicien avec son frère, la vielle et la vièle, l'île d'Arran (Ecosse) avec les îles d'Aran (Irlande)…
- la chronique graphiste : le chroniqueur a oublié qu'il y a un CD dans la pochette et ne s'intéresse qu'à l'esthétique de celle-ci.
- la chronique hifi : elle ne prête pas attention aux mélodies, aux paroles des chansons ou aux harmonies, mais au rendu des basses dans le salon, à la séparation des canaux, à la présence de ronflettes… : rare dans Trad. mag. : les chroniqueurs n'ont pas les moyens de s'offrir le matériel d'écoute ad hoc…
- la chronique règlement de compte : peu fréquente dans Trad. Mag non plus, elle est surtout l'apanage des revues plus scientifiques et s'applique surtout aux livres : le chroniqueur (généralement de l'école adverse, naturellement) refait toute l'étude pour démontrer que celle dont il est question ne vaut rien.
- la chronique plagiat : c'est l'inverse de la précédente, l'auteur semble tellement convaincu de ce qu'il a lu qu'il en reprend le résumé à son compte…
Et la chronique idéale me direz vous ? Et bien elle prend tout simplement un peu dans différentes catégories citées ci-dessus pour en faire un tout cohérent et équilibré…
(1) si cela ne vous évoque rien, fouillez les vieux courriers des lecteurs
Avec tout cela (1), je ne vous ai pas encore expliqué pourquoi j'ai décidé, presque du jour au lendemain, d'arrêter de rédiger ces fameuses chroniques, ici et ailleurs.
Commençons par rappeler que, comme la plupart des rédacteurs de la revue, j'ai toujours fait cela à titre bénévole. Et, je vous rassure, si j'ai arrêté cette activité, ce n'est certainement pas pour me tourner vers des actions plus lucratives…
Rédiger des chroniques permet naturellement de recevoir et de conserver ensuite, les CDs, DVD et livres concernés. Vu le temps consacré à chaque chronique et la valeur actuelle de ces objets, l'intérêt n'est guère financier. Certains pratiquent bien la revente sur le marché de l'occasion mais, vu la décote, la plus value est encore moindre et il s'agit plus souvent pour eux de faire de la place que d'arrondir les fins de mois. Personnellement, je ne me suis jamais décidé à me séparer d'une œuvre chroniquée et les rares fois où j'en ai revendues, c'est que je les avais achetées avant de les recevoir et qu'il y avait donc double emploi… (2)
Non, la motivation des chroniqueurs est bien plutôt de deux ordres : comme déjà indiqué dans mon premier papier sur ce sujet, elle vise d'abord à faire connaître des œuvres et des artistes, à partager des coups de cœur, voire même certaines déceptions que l'on espère ainsi rendre passagères.
Le second élément de motivation est de se tenir au plus près de l'actualité des musiques en question, de recevoir les enregistrements dès leur sortie sans avoir à se poser la question " j'achète ou j'achète pas "… Chaque CD qui arrive dans la boîte aux lettres est un petit cadeau, non pas pour ce qu'il vaut, mais par ce petit lien qu'il nous offre avec ce milieu musical.
Et puis arrive un jour où l'on regarde avec hantise la pile de boîtiers sur le coin du bureau, édifice instable qui semble ne jamais vouloir perdre de la hauteur malgré les envois réguliers des chroniques à la rédaction. Arrive un jour où le calendrier et ses dates butoir deviennent une sourde menace (je me suis toujours fait un point d'honneur à rédiger pour le numéro suivant les chroniques de tous les CD reçus au moins 8 jours avant la date de bouclage, ce qui ne signifie pas forcément que leur publication a été faite dans le numéro visé…) Arrive un jour où l'impression de voir toujours les mêmes phrases, les mêmes expressions revenir au bout du stylo. Un jour où, à force d'écouter sans cesse des nouveautés, plus rien ne semble vraiment neuf. Un jour surtout, où l'on se rend compte que l'on n'a plus guère le temps d'écouter de la musique en dehors de cette mission et que les CDs déjà chroniqués, même ceux auxquels on a attribué les " Bravos ", ne trouvent plus le loisir de revenir sur la platine…
Quelle meilleure solution alors que de tout laisser tomber pour redevenir un simple auditeur, libre de mettre ce qu'il veut sur sa chaîne ou son baladeur, d'écouter juste pour le plaisir, sans forcément analyser, sans se demander ce qu'il va bien pouvoir écrire là-dessus (3) ?...
Un critique bien connu m'a déjà prévenu que je ne tiendrai pas longtemps et que je repiquerai au truc, comme un drogué… Je tente donc l'expérience en me gardant bien d'affirmer que "j'assume la pleine responsabilité (…) et que je me retire définitivement etc… ". Pour la pleine responsabilité de ce que j'ai pu écrire je veux bien (4), mais pour le reste, on verra…
(1) voir les trois parties précédentes de cette rubrique
(2) J'ai bien une raison d'arrêter qui se rattache à cela mais elle est plutôt inverse : comme je ne me décide pas à m'en séparer, je ne sais plus ou stocker tous ces CDs et autres, d'autant que je continue à en acheter… voir photo…
(3) là je pense qu'il va me falloir un temps de désintoxication, un peu comme lorsque l'on revient d'un voyage à l'étranger et que, pendant, quelques jours encore, on continue de préparer pour rien, dans la langue du pays en question, chacune de ses phrases…
(4) d'ailleurs, avec l'autorisation de la revue, je suis en train de mettre en ligne l'intégralité de mes chroniques sur http://musette.free.fr
Sommaire complet de chroniques
Vers les pages de chroniques infosmumuses, des plus anciennes aux plus récentes (mi-2009) :
Les présentations sans véritable chronique (postérieur à mi 2009) : CD 1, CD2, CD3 et livres
Les chroniques écrites pour Trad. Magazine (1991-2009) :
Discographie violoncelle dans la musique trad.
Discographie de Noël
Discographie de la musette baroque