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Jean-Luc Matte

Les chroniques CD écrites pour Trad. Magazine
(2/20 France)

De 1991 à 2009, j'ai rédigé diverses chroniques dans le revue Trad. Magazine que cette revue m'a autorisé à vous mettre en ligne. Les date de parution sont citées, mais ces textes ont été écrits au minimum deux mois auparavant et parfois jusqu'à plus d'un an...

Tout ceci était indépendant des chroniques que j'ai rédigé pour mes infosmumuses, mais pour cette mise en ligne, je ne me prive pas de mettre des renvois des unes vers les autres .... 

Pour savoir comment a débuté et fini cette aventure, lire "Chronique Story"

Sommaire de toutes les chroniques


Misteri de Nadau
"Pastorale béarnaise"

"Cassette souvenir des soirées de décembre 1994 en la cathédrale de Lescar"
Association Esquireta 64230 Lescar

En titrant cet enregistrement "Cassette souvenir", l'association Esquireta fait preuve d'une modestie quelque peu exagérée : cette cassette n'intéressera pas uniquement les privilégiés qui ont pu assister à la pastorale donnée l'an dernier à la Cathédrale de Lescar par 150 choristes, 11 musiciens, un récitant, acteurs et animaux (voir article dans Pastel n°26). Habitant à l'autre extrémité de la France, je n'ai pas eu le loisir de faire le déplacement et, si cette cassette est bien évidemment incapable de recréer toutes les facettes d'un tel spectacle, elle tient très bien son rang parmi les nombreux enregistrements consacrés à la fête de Noël. La plupart des morceaux sont des cantiques entonnés par des choeurs féminins, masculins ou mixtes et généralement soutenus de manière discrète mais efficace par les instruments traditionnels gascons (flûte à trois trous et tambourin à cordes, violon, clarin). Si l'on reconnaît aisément certains "timbres" connus dans la France entière, ici chantés dans leur version occitane. On découvre également des Noëls dont les mélodies fleurent bon le Sud-Ouest. L'interprétation cadre tout à fait avec le répertoire et le grain des voix évoque davantage l'odeur de l'encens que l'atmosphère du studio ou de la salle de concert. Les choeurs masculins dégagent en particulier une énergie que l'on ne retrouve que rarement dans les chorales (plage n°3 par exemple). Petite cerise sur le gâteau ; cette cassette permet d'entendre pour la première fois la samponha, cornemuse à deux tuyaux mélodiques et bourdon imaginée par Jacques Baudoin à partir de documents iconographiques locaux et dont le prototype a été réalisé par Bernard Blanc (voir Pastel n°19 et 20). Si l'enregistrement ne permet pas vraiment de se rendre compte des réelles possibilités de l'instrument (ne pas se fier au texte de la pochette, elle n'apparaît qu'à la fin de la face B et non sur la face A), il permet au moins de constater que ça marche et on attend la suite...

J.L. Matte (paru dans le n°44 janv-fev 1996)

Rappels :
- Misteri de Nadau a fait par la suite l'objet d'une édition en double CD : Lire ma chronique de ce CD

- et voir ma page consacrée à la discographie de la période de la nativité en musiques traditionnelles


Er Naveth
"Sauts e branlos deth Biarn -flabutar et tamborins"

 

Autoproduction : Ass. Adarron 1 rue Chantilly 64000 PAU

Si la musique traditionnelle gasconne est connue en France de longue date et si celle du pays basque a fait une percée récente chez les disquaires, celle du Béarn, souvent confondue avec les deux précédentes, reste mal connue malgré quelques beaux enregistrements (Pierre Arrius Mesplé par exemple). Voici donc une première raison de s'intéresser à ce C.D. consacré aux sauts béarnais. La deuxième raison est une interprétation très convaincante (belle pulsation qui vous donne envie de danser), sur les instruments traditionnels : flûtes à trois trous et tambourins à cordes, violons (très belle plage 2) et accordéon diatonique. On peut également y entendre la cornemuse (re?)créée par J. Baudoin sur la base de documents iconographiques et des contraintes du répertoire local (polyphonie). Si les fondements de sa démarche ont suscité quelques débats (voir revue Pastel n°19 et 21), le résultat musical peut être apprécié sur cet enregistrement, même si le mixage, respectant la fonction d'accompagnement dévolue à cet instrument, ne la met jamais au premier plan. Si le nom du groupe ne vous dit sans doute rien, précisons qu'il s'agit de la famille Baudoin (à laquelle s'est adjoint J.C. Arrosères) que vous avez forcément croisés si vous fréquentez St-Chartier, souvenez-vous, par exemple, du solo de flûte-tambourin dans le public avant le concert de J. Baez... La troisième raison de s'intéresser à ce CD est une partie CD ROM bien conçue (très belle finition) qui devrait vous occuper une bonne heure en vous faisant découvrir le Béarn, les musiciens du disque, les instruments, les danses (les séquences de sauts sont listées ainsi que dans le livret mais cela ne vous aidera que si vous connaissez déjà ce type de danse) et bien d'autres belles choses à découvrir rien qu'en cliquant avec l'oreille d'une petite chienne...

J.L. Matte (paru dans le n° 65 mai-juin 1999)


Jean Pascal Leriche - Arcolan
"'Brasse le vent !"

Dralhe dist "L'Autre Distribution"
Recommandé Trad. Magazine

Voici un musicien dont j'ignorais l'existence et qui débarque sans prévenir dans ma discothèque avec un CD à la fois original et très abouti. Le livret m'apprend, de plus, qu'il joue sur des bohas (cornemuses landaises) de sa fabrication. C'est d'ailleurs ici que commence l'originalité de l'enregistrement : J.P. Leriche en assume l'intégralité, jouant exclusivement de la boha, non pas en solo mais en s'auto-accompagnant, grâce aux techniques d'enregistrements multiples, avec des instruments de tonalités différentes (pas moins de 12, dont un plus polyphonique). Il est bon d'ailleurs de souligner la qualité de l'enregistrement qui nous fait réellement pénétrer dans la bulle sonore créée par le musicien, bulles multiples d'ailleurs qui semblent éclater à chaque changement de tonalité pour vous replacer dans une nouvelle bulle tout aussi confortable. L'une des caractéristiques musicales de la boha est la présence de son "bourdon" à deux tons. L'utilisation de celui-ci peut être essentiellement rythmique (elle l'était probablement dans le jeu traditionnel, à l'instar de celui des cornemuses slovaques ou hongroises de même principe), J.P. Leriche joue davantage sur les possibilités harmoniques ainsi ouvertes (montrant qu'il s'agit réellement d'un bourdon, mais variable) et étend encore celles-ci en jouant sur l'utilisation d'instruments de tonalités différentes. Ce qui précède pourrait laisser penser qu'il s'agit de musique expérimentale : il faut donc que je précise que tout ceci s'appuie sur des airs traditionnels ou de facture proche que J.P. Leriche fait vivre avec un beau phrasé (notes à peine glissées, appoggiatures efficaces, micro-suspensions dans le rythme). Regrettons juste quelques tempi un peu rapides et la durée globale un peu courte.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°80 nov-dec 2001)

Rappel : Lire la chronique de ses 6 CDs de déchiffrage de F. Arnaudin


" Cornemuses - Morceaux choisis d'une rencontre 93 "

AMTA, coll " Les musiques du paysage " http://www.amta.com.fr

La cornemuse faisant office d'instrument locomotive en matière de musique traditionnelle, elle est souvent servie en premier, honneur qui lui vaut généralement... d'essuyer les plâtres. L'édition par l'AMTA en 1993 de trois cassettes réunissant 50 morceaux interprétés aux musettes du centre lors d'un week-end rencontre chez les Brayauds en est un bel exemple : accordéon, violon puis vielle-à-roue bénéficièrent par la suite de l'expérience et furent successivement édités les années suivantes en CD (trois CD indispensables pour amateurs de musiques du Centre soi dit en passant !...). L'édition en CD permettant une meilleure qualité sonore et s'avérant plus attractive qu'un lot de trois cassettes (50 morceaux pur cornemuse ça peut faire peur, même jouée selon les cas en solo, duo et trio...). L'AMTA vient donc de rectifier le tir en éditant en CD une sélection de 22 plages (soit près de la moitié) de manière à replacer nos joueurs de musette sur un pied d'égalité avec leur confrères. Personnellement j'aurai été bien en peine de faire cette sélection sans état d'âme. Il aurait été diplomate d'essayer de conserver la présence de chacun des 27 musiciens mais ça n'est pas l'option qui a été choisie et huit d'entre eux sont (malheureusement) absents du CD. Le choix a par contre favorisé les vieux routiers de la cornemuse que sont J. Blanchard, E. Montbel, M. Baudimant, W. Soulette et autres frères Blanc ou Paris mais on y retrouve également à l'opposé des musiciens plus jeunes tels les frères Meunier du trio Grandvallier (qui vient de sortir un très bon CD). Notons l'originalité du répertoire : il ne s'agit en aucun cas d'un quelconque disque de compilation et très rares sont les morceaux de ce CD (idem pour les cassettes) à avoir été enregistrés par leurs interprètes sur d'autres CD ou vinyls et les standards n'y sont pas nombreux. Il y a bien les " Grandes Poteries " mais sous les doigts de P. Prieur ce grand classique ne l'est plus vraiment. L'un des intérêts de ce type d'enregistrement est d'ailleurs de pouvoir apprécier la personnalité de chaque musicien. Je vous conseille d'effectuer la première écoute en aveugle : impossible de ne pas reconnaître le phrasé d'Eric Montbel ou le vibré oh combien efficace de Mic Baudimant sur sa 13 pouces; Jean-Claude Blanc est le plus facile à identifier : il est le seul à oser manier la 26 pouces en soliste.... Signalons enfin que les 3 cassettes originales sont toujours disponibles et que les 28 morceaux non repris en justifient l'achat (150 F), à moins que l'AMTA ne nous en fasse un volume II qui n'aurait rien d'un ramassis de fonds de tiroir et qui pourrait tenir la dragée haute à bien d'autres productions.

J.L. Matte (paru dans le n°57 Janv-fev 98)

Rappel : les 3 cassettes originales


Joseph Bodin de Boismortier "Sérénades chez Marie Leczinska"

Le Concert Spirituel direction Hervé Niquet

 

Naxos, http://www.naxos.com/naxos/countries/France/
CD double 59mn + 73mn

Hervé Niquet poursuit à juste titre son travail de réhabilitation du compositeur baroque français Joseph Bodin de Boismortier et nous propose un double CD d'un prix attractif qui contient, outre, entre autres, de très intéressantes pièces pour clavecin, plusieurs œuvres avec musette baroque et vielle-à-roue, qui justifient la présente chronique dans ces colonnes. Ces "Fragments mélodiques" et ce "Concerto pour zampogna" (fantaisie du compositeur dans le titre : il s'agit bien d'une œuvre pour musette baroque) n'avaient à ma connaissance jamais été enregistrés et l'on ne peut que regretter que l'enregistrement ne rende justice ni à la qualité des interprètes (J.C. Maillard à la musette et M. Loibner à la vielle), ni à celle des œuvres en question. En effet, comme je l'avais déjà déploré pour la prise de son du précédent enregistrement de cet ensemble, le niveau sonore de nos deux instruments " champêtres " demeure en retrait et leur sonorité manque de présence ce qui dénature passablement certaines parties concertantes où ils assurent la partie soliste*. On s'étonnera également que les secondes parties de vielle et de musette aient été purement et simplement supprimées des "Fragements mélodiques" alors que l'ensemble d'Hervé Niquet comporte un second vielleux et un second joueur de musette. La légendaire rigueur des musiciens baroques s'effraierait-elle des sonorités des instruments à bourdon ?

J.L. Matte (paru dans le n°68 Nov-décembre 1999)

* Note : le temps a passé depuis la la rédaction de cette chronique et je suis aujourd'hui moins convaincu de ma remarque sur la balance entre la vielle et la musette d'une part et le reste de l'orchestre d'autre part. Il se pourrait bien, en effet, que cet équilibre soit ici proche du naturel et que ce soit, à contrario les enregistrements précédents consacrés à la musette qui aient mis celle-ci artificiellement en avant. Il n'empêche que la suppression des secondes parties de vielle et musete demeure... JLM janvier 2010


Joseph Bodin de Boismortier - "Ballets de village et Sérénade."

Le concert Spirituel dirigé par Hervé Niquet.

ed. Naxos http://www.naxos.com/naxos/countries/France/
Durée : 74'77"

Il ne s'agit pas de musique traditionnelle mais comment ne pas signaler l'enregistrement de ces ballets de village, "symphonies à trois" pour orchestre baroque, deux vielles et deux musettes ? En l'occurrence ces dernières, ont été judicieusement confiées respectivement à Riccardo Delfino (souvenez vous le vielleux de l'ensemble Oni Wytars à St-Chartier 96), Matthias Loibner, Jean Pierre Van Hees et, bien entendu, Jean Christophe Maillard qui signe par ailleurs l'un des textes du livret. Il est un peu dommage que la prise de son n'ait pas donné plus de présence à ces instruments solistes au sein d'oeuvres qui contrairement à ce que laisse penser le titre générique et l'instrumentation, ne sont nullement des pièces de danse. Les thèmes de danse sont par contre la base de deux autres oeuvres, sans instruments dits champêtres, qui complètent par ailleurs le programme de cet enregistrement. La région Lorraine semble avoir redécouvert que Joseph Bodin de Boismortier est né à Thionville en 1689 et s'il ne vécut guère en Lorraine elle lui rend un hommage efficace en aidant à l'édition de diverses oeuvres de ce musicien (trop ?) prolixe qui semble en voie de réhabilitation aujourd'hui après avoir été considéré durant plusieurs siècles comme tout juste bon à fournir des pièces à étudier aux jeunes flûtistes. Souhaitons que d'autres parmi les nombreuses oeuvres de ce compositeur écrites pour vielles et/ou musettes soient ainsi enregistrées. Edités par Naxos à des prix très intéressants ces C.D. sont dotés de pochettes presque fluos assez inhabituelles pour du baroque.

J.L. Matte (paru dans le n°60 juillet-août 1998)

Rappels : deux autres CD de la même série (toujours sur des oeuvres de Boismortier et sous la direction d'Hervé Niquet), mais sans musette baroque :

Les menus plaisirs du Roy "Joseph Bodin de Boismortier - Divertissements de campagne"

Voir également le recueil de répertoire pour épinette établi par Christophe Toussaint à partir des oeuvre de Boismortier

ainsi que l'ouvrage de Stéphan Perreau "Joseph Bodin de Boismortier (1689-1755) Un musicien lorrain-catalan à la cour des Lumières" 2001, l'auteur de cet ouvrage ayant également enregistré un CD avec les sonates pour deux flûtes traversières. 


Jean-Christophe Maillard
"L'art de la cornemuse vol.2, La musette de cour."

Arion ARN 60378 http://www.arion-music.com
durée : 46'48

La réédition d'un vinyl en CD donne toujours l'occasion d'écouter l'enregistrement en question avec le recul des années. Ceci est d'autant plus vrai lorsque le disque en question a marqué une étape dans un mouvement musical ou la redécouverte d'un instrument comme c'est le cas ici. En effet quand Jean Christophe Maillard enregistra en 1983 ce qui s'appelait alors " L'art de la musette ", il réalisait le premier véritable disque centré sur cet instrument et signait ainsi, après des années d'apprentissage et de travail sur le sujet, la véritable renaissance de la musette en tant qu'instrument de musique et non pas comme simple curiosité. J.C. Maillard a, depuis lors, enregistré deux CD consacrés à l'instrument et participé à plusieurs enregistrements d'opéras baroques avec des ensembles réputés. On pouvait donc craindre que cet enregistrement ait mal vieilli : il n'en est rien et, bien au contraire, on ne peut que constater une parfaite maîtrise de cette capricieuse et complexe petite cornemuse, un accompagnement parfaitement assuré et un répertoire judicieusement choisi (le " premier concert champêtre " d'E.P. Chédeville qui ouvre le programme restera toujours pour moi le morceau qui me vient en tête lorsque j'évoque la musette baroque). La réédition en CD était donc tout à fait justifiée.

J.L. Matte (paru dans le n°58 mars-avril 1998)


"Roméo et Juliette"
Musique originale de Eric Montbel

CMTRA/Bienale du fort de Bron
Durée : 39'35
VPC FAMDT http://www.famdt.com et CMTRA http://www.cmtra.org
Recommandé Trad. Magazine

Rassurez-vous ce Roméo et Juliette n'est pas la dernière comédie musicale dont on nous rebat les oreilles depuis un an. Ce CD est, au contraire, sorti dans la plus grande discrétion médiatique. Il faut dire qu'il reprend les moments musicaux d'un spectacle de 4 heures et demi qui fut donné en 1997, pendant 2 mois et demi, à Lyon, devant 15 000 spectateurs : de quoi assurer un débouché suffisant sans doute... La conception musicale en avait été confiée à Eric Montbel qui en a composé tous les airs (même si la plage 7 à un petit air de presque déjà entendu…) et qui s'est joliment entouré, pour l'interprétation, de sa complice Laurence Charrier aux divers claviers, de Catherine Faure que l'on connaissait chanteuse (Roulez fillettes) ou violoniste (Drailles) et que l'on découvre ici, en plus, joueuse d'oud et flûtiste et de Patrick Mazellier (violoniste alpin également connu). Quant-à Marc Bernad à la vielle à roue et Louis Soret (chalemie, saz et percussions) leur présence donne aux airs à consonance renaissance une belle crédibilité. Les compositions oscillent, en effet, entre Renaissance et airs plus actuels, dans l'esprit de ce qu'Eric Montbel a déjà enregistré avec Lo Jai, Retroviseur ou Ulysse, airs qu'ils sait si bien interpréter, aux flûtes et cornemuses, avec son phrasé personnel et unique (La "pavane des courtisanes" est un vrai régal dans ce style). A ceux qui jugent les CD à leur durée, je préciserai que le prix de celui-ci tient compte de relativement courte durée. A écouter en attendant la sortie, à l'automne, du second CD du "Jardin de l'ange".

Jean-Luc Matte (paru dans le n°78 juillet-août 2001)


UGMM
"Dansons L'Auxois"

UGMM : http://www.ugmm.org
Durée : 29'41
Recommandé Trad. Magazine

Si le Morvan est désormais une région bien connue des amateurs de musique trad. française, il n'en est pas de même de l'Auxois qui le borde au nord-est et dont les musiciens et danseurs eux-mêmes commencent seulement à valoriser le répertoire. Les relations des deux pays sont cependant très étroites et ce livret-CD consacré à la Sauteuse, danse propre à l'Auxois, est produit par l'UGMM et fait intervenir divers groupes et musiciens des deux régions. Première bonne surprise, pour un CD consacré à une danse, la plupart des plages font intervenir le chant, rappelant ainsi à ceux qui auraient tendance à l'oublier, que celui-ci demeure l'un des meilleurs instruments à danser. On appréciera par exemple la prestation a cappela de R. Guillaumeau ou celle de Jean-Luc Debard, simplement soutenu au violon. Mais revenons-en à cette sauteuse dont la pulsation musicale rappelle quelque peu celle de la maraîchine : le livret ne vous permettra certes pas d'apprendre à la danser (il y a des stages pour cela) mais rassemble un ensemble de textes divers sur le sujet mais également sur la musique modale et, bien entendu, textes et partitions. Un seul regret : ce CD est un peu court, j'aurais bien repris un petit coup de Zuarne (pour les beaux vibrés et le jeu bien posé de V. Belin à la cornemuse), heureusement, je peux retrouver ce groupe sur les deux CD de "Dansons le Morvan" dont celui-ci constitue presque un troisième volume.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°79 sept-oct 2001)


UGMM
Les violons de l'Auxois

UGMM : http://www.ugmm.org
Durée : 36'54
Recommandé Trad. Magazine

Pour ceux qui n'auraient pas suivi les épisodes précédents ou qui sont fâchés avec la géographie, l'Auxois est la région située immédiatement au nord du Morvan, autour de Semur-en-Auxois, ville connue en particulier pour son patrimoine architectural, sa biscuiterie qui alimente les comités d'entreprises et son facteur de cornemuses B. Jacquemin (mais c'est Marie-Celse qui figure ici parmi les violons…). Les musiciens de cette région ont de fortes affinités avec leurs voisins morvandiaux, notamment via l'UGMM. Ces derniers leurs rendent la pareille et l'UGMM finira peut-être par ajouter un jour le A d'Auxois à son sigle…. Ce CD consacré au violon, et plus particulièrement au répertoire de deux violoneux de l'Auxois, en est un nouveau témoignage et fait intervenir musiciens de la plaine et de la montagne, sur des arrangements très orchestraux de Pierre Hervé. L'écoute de la première plage m'a d'ailleurs rappelé l'ambiance de certains " folkorkesters " flamands. Visiblement (si l'on peut dire….) il y a eu un important travail réalisé car l'ensemble est très propre et les interprétations très bien senties : voici une nouvelle bande de violons qui n'a rien à envier à ses consœurs d'autres régions… Le chien d'une vielle ou un diato viennent parfois renforcer la rythmique mais c'est à peine s'il en est besoin tant la cadence est dans les archets. Ce CD étant tiré d'un spectacle, les morceaux sont entrecoupés de quelques témoignages anciens contés par J.L Debard et là j'avoue que j'ai eu un peu de mal à m'y faire, tant nous avons été habitués à entendre dans divers enregistrements de collectages, ce même type de récits dits directement par leurs informateurs. Sans remettre en cause le talent de J.L. Debard dont j'ai déjà pu apprécier l'efficacité sur scène, la différence saute ici aux oreilles comme la photo d'une reconstitution de noce ne saurait se faire passer pour un cliché original. Mais c'est un sentiment tout personnel (voir mon avis sur les reconstitutions dans une autre chronique de ce même numéro…) Et que cela ne vous empêche pas d'apprécier le principal, c'est-à-dire toute la partie musicale de ce CD.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°110 de nov-dec. 2006)


UGMM
"Tantôt sur lai mûzotte
Noëls et airs religieux entre Bourgogne et Nivernais"

UGMM : http://www.ugmm.org
Durée : 63'07
Bravos Trad. Magazine
 

Il est dommage que cette chronique n'ait pu paraître avant Noël mais le CD n'était pas encore paru. Fort heureusement il ne comporte pas que des airs de la nativité : la première plage, par exemple, est une passion, vous pouvez donc encore commander cette galette avant Pâques… Fidèle à son habitude, l'UGMM nous propose un nouvel enregistrement rassemblant divers groupes et musiciens morvandiaux mais celui-ci est, à mon sens, le plus abouti de tous ceux que cette association a produits. Chaque plage dénote un vrai et beau travail d'arrangement, de mise en place et d'interprétation (allant jusqu'à l'utilisation de l'enregistrement multiple) et chacune mériterait un commentaire propre. Amateurs de cornemuses vous serez servis car l'instrument des annonces aux bergers y est prédominant et très bien servi, le plus souvent en polyphonie. Chants et instrumentaux sont essentiellement tirés des collectes de Milien et si un certain nombre n'avaient pas encore été enregistrés jusqu'alors, quelques-uns font déjà figure de standards que nos morvandiaux revisitent à leur manière, sans craindre parfois une certaine audace (on aimera ou pas l'irruption de la rythmique au milieu de la Madeleine, le cantique virant doucement en morceau de bal ou celui traité en gospel). Tout n'est cependant pas tiré de Millien et les "Litanies de la Vierge de la Cathédrale d'Autun", par exemple, sont un vrai régal. Seule une plage, chantée sans conviction me chagrine un peu mais pour le reste, on ne peut dire que bravo !

Jean-Luc Matte (paru dans le n° 82 mars-avril 2002)

Rappel : voir ma page consacrée à la discographie de la période de la nativité en musiques traditionnelles

Gilles Desserprit et Christian Citel : Les copains "Autour d'Anost - musique du Morvan"

 


U.G.M.M.
"Bourrées du Morvan"

UGMM : http://www.ugmm.org
Durée : 52'17
Recommandé Trad. Magazine

Voici la nouvelle production de l'U.G.M.M. qui, comme à l'accoutumée, nous donne à entendre la plupart des groupes morvandiaux actuels. Première bonne surprise : le cercle s'élargit et, en sus des acteurs bien connus que l'on pouvait entendre dans les dernières productions, de nombreux nouveaux noms apparaissent et pas moins de 50 personnes interviennent sur les 16 plages de ce CD, aucun n'étant d'ailleurs présent plus de trois fois (et il y a un absent de marque…). Seconde bonne surprise de ce CD consacré aux bourrées (morvandelles cela va sans dire !) : on quitte les classiques maintes fois enregistrées pour nous offrir pas mal d'inédits tirés de Millien ou de différents collectages (si le livret est plutôt minimaliste, les sources sont toutes citées.) Pour le reste, il est difficile de décrire globalement ces enregistrements en quelques lignes, chacune des 16 plages a sa personnalité propre et parfois même multiple : des interprétations classiques côtoient quelques tentatives plus osées que l'on aimera ou pas (l'intro de la première bourrée, en gamme bien peu morvandelle, celle au second degré des K'fées prunelles, ou encore les harmonies un peu tendues de Zuarne). Et puis il y a également pas mal de plages à caser entre ces deux extrêmes, avec des arrangements parfois discrets mais soignés. Comme dans les autres régions du Centre, la bourrée n'est pas qu'instrumentale en Morvan et, outre vielles, cornemuses et diatoniques etc… on entend pas mal de voix sur ce CD, je retiens en particulier celle d'Anaïs Guillaumeau et celle de Daniel Raillard pour la conviction qu'ils savent tout deux y mettre, dans des styles différents. Bref, si vous pensez encore que" la bourrée c'est toujours la même chose", écoutez ce CD et vous changerez d'avis (et il vous restera encore celles des autres régions à découvrir…).

Jean-Luc Matte (paru dans le n°89 mai-juin 2003)


Compagnie Outre Mesure
"Dansez Renaissance"

Contact : http://www.compagnie-outre-mesure.com/
Bravos Trad. Magazine

Le milieu des musiques dites anciennes et celui des musiques dites traditionnelles, malgré leurs affinités, ne se rencontrent que rarement et c'est souvent dommage. Sur le plan instrumental par exemple, les groupes de musique médiévale, possèdent généralement de bons flûtistes mais très rarement de bons cornemuseux, l'instrument étant généralement confié au hautboïste ou au flûtiste qui ne possède pas la technique adaptée. Les choses évoluent toutefois dans le bon sens et le présent CD constitue indéniablement un pas en avant dans cette démarche en se plaçant résolument à mi-chemin des deux domaines. Pour ce qui est du cornemuseux, nous sommes servis puisqu'il s'agit de Thierry Bertrand, indéniablement l'un de nos meilleurs gonfleurs de poches actuels et qui le démontre encore une fois au travers de cet enregistrement : un style de jeu très personnel aussi efficace dans les parties rythmées que sensible dans les airs plus mesurés (écoutez l'ouverture de la plage 7 !). Ajoutons-y la vielle de Laurent Tixier (Yole), au coup de poignet également redoutable et voici déjà deux raisons de s'intéresser à cet enregistrement. Mais il ne faudrait pas oublier le reste de la compagnie, tous musiciens remarquables, qui assurent en outre une couleur musicale un peu plus conforme à ce que l'on peut attendre d'un disque de musique renaissance avec flûtes à bec, hautbois, cornets à bouquin, luth et percussions diverses. Le répertoire, essentiellement orienté par la lecture de l'Orchésographie (voir article sur cette compagnie dans T.M. n°71), est entièrement dédié à la danse et mêle standards du bal renaissance, souvent agréablement revisités (branle des chevaux par exemple), pièces un peu moins connues et quelques compositions plus récentes traitées dans l'esprit dont une version de la "framboise" de Bobby Lapointe traitée en gaillarde ! Un mot encore sur le livret, remarquablement complet (y compris propositions chorégraphiques) et sur la belle pochette, plutôt originale pour ce type de musique. J'ai donc toutes les raisons d'accorder les bravos à ce CD dont l'audience devrait dépasser celle des mordus de danse renaissance, en espérant que personne ne m'accusera de l'avoir fait par renvoi d'ascenseur, le livret faisant un peu de pub à la revue...

Jean-Luc Matte (paru dans le n° 81 janv-fev 2002)

Rappels : la Compagnie a publié par la suite, en coproduction avec Intégral Classic, "Orchésographie.com" un coffret triple CD de l'intégrale des danses récréatives de l'Orchésographie, "Itinéraire d’un vielliste à roue au 16e siècle" et, en 2009, un CD enregistré (et distribué par) le château de Chambord : "Bal au Château de Chambord, Concert d’Alta"

Thierry Bertrand : voir à partir de Sloï
Sloï


La Fanfare de Cornemuses
"Chroniques"

 

Autoproduction : 04-70-45-14-60 ou http://welcome.to/traverse
Durée : 48'38
Recommandé Trad. Magazine

Peux-t-on, comme si de rien n'était, chroniquer un CD dont le maître d'œuvre vient de nous quitter et qui doit, à l'heure qu'il est, faire le bœuf avec l'un de nos anciens ? Cette "Fanfare de cornemuses" a été, en effet, montée par Michel André, décédé fin 2001 et Brigitte Gamba. Michel est d'ailleurs l'auteur de la plupart des mélodies, textes et arrangements de ce CD. Michel et Brigitte avaient déjà démontré leur talent au sein du trio Sautivet, leur "fanfare" rassemble beaucoup plus de monde mais l'expérience du trio semble les avoir marqués car ils ont su éviter le piège du plein jeu trop fréquent et ne se sont pas risqué aux voix trop nombreuses. Si la pochette ne le mentionne pas, on devine que ce sont eux qui interprètent la plupart des parties solistes (je me le suis fait confirmer). Le jeu de ces cornemuses s'inscrit indéniablement dans ce que l'on pourrait maintenant appeler l'école Centre-France d'ensemble de cornemuses, dans laquelle se reconnaît encore l'influence de la Grande bande (par exemple dans ces morceaux avec voix en boucle dont il ne faudrait toutefois pas abuser). J. Blanchard a d'ailleurs mis sa patte de soliste dans cet enregistrement en nous offrant de regarder "Dans les yeux de Marie" 20 ans après. Sylvie Berger est également venue soutenir certaines parties chantées. Si ces dernières me semblent techniquement légèrement en deçà de la section instrumentale (les textes sont beaux mais les mélodies semblent plus destinées à être jouées que chantées), elles viennent agréablement reposer l'oreille et relancer l'attention. D. Manchon me souffle que la plage 5 comporte des bourdons en Sol et Do alors que la mélodie (surtout la seconde partie) est résolument en sol mineur et demanderait donc des bourdons en Sol et Ré : il faudra qu'il nous fasse une piqûre de rappel sur le sujet…La pochette au look de photocopie leur a valu de ne pas traiter avec le distributeur prévu aussi ne vous laissez pas rebuter : le contenu sonore est plus coloré.

Jean-Luc Matte (paru dans le n° 83 mai-juin 2002)


La Fanfare de Cornemuses
"Je naviguerai sur la Loire"

Durée :
Autoproduction : 04-70-45-14-60 ou http://welcome.to/traverse
Recommandé Trad. Magazine

Dans le numéro 110 de votre revue, j'ai chroniqué le CD du "Cornemuse Consort Coelln" et je pourrai reprendre une bonne partie de ce texte pour l'appliquer au présent CD qui émone également d'un ensemble de musettes du Centre (huit 16 pouces + une 11 et une 23), dont c'est également le second album et qui joue également de façon très propre sur des instruments bien accordés entre eux (on en remerciera jamais assez les facteurs, ici B. Blanc et J.S. Maître pour leur travail) mais avec ce qu'il faut de frottements résiduels pour que l'on n'ait pas l'impression d'entendre un synthé... Et ici aussi je pourrai pinailler un peu sur l'interprétation de telle ou telle plage qui pourrait être un peu plus sentie. Généralement ce sont les parties en grand ensemble qui pêchent un peu de ce côté : passé un effectif de quatre ou cinq musiciens, un vrai travail de direction est nécessaire pour dépasser le stade de l'interprétation propre. D'ailleurs les parties en plus petit effectif, voire en solo, sont nettement meilleures aussi ne vous privez pas, par exemple, de ce magnifique solo puis unisson à deux 16 pouces sur "Ce même chemin" ou de vette valse lente sur la plage 6 en solo de 11 poucess, discrètement accompagné à la guitare. Menée par Brigitte Gamba, la Fanfare de cornemuses fait vivre le répertoire et les arrangements laissés par Michel André (1), malheureusement disparu juste avant la sortie du précédent CD : instrumentaux pour ensemble de cornemuses dans des arrangements qui rappellent parfois ceux de la Grande Bande avec ces faux ostinatos de 23 pouces, mais également quelques chansons dont l'interprétation est parfois loin d'être évidente de par les modes utilisés. Quelques autres instrumentistes (clarinette, saxo, basse, guitare) viennent parfois soutenir les cornemuses ou les chanteurs et apportent quelques petits changements d'ambiance sonore, histoire de reposer les oreilles, mais l'ensemble reste très centré sur les musettes. et comme je l'ai écrit pour le CD du CC. Coelln, j'attends le prochain album pour pouvoir décerner les Bravos...

(1) pour ceux qui ont la mémoire courte, Brigitte et Michel constituaient, avec Eric Elsener, le Trio Sautivet

Jean-Luc Matte (paru dans le n° 111 janv-fev. 2007)

Il faut que retrouve cette chronique....


FRANCE
The Alan Lomax Collection

Durée : 72'38
Recommandé Trad. Magazine

Contrairement à la plupart des CD de cette collection, celui-ci ne présente pas des enregistrements réalisés par Alan Lomax mais, principalement, des collectages réalisés dans les années 50 par Claudie Marcel Dubois et Marguerite Pichonnet Andral dans le cadre des enquêtes du Musée des A.T.P. Certains de ceux-ci avaient d'ailleurs été déjà publiés sur vinyl en 1954. Ils sont complétés par d'autres collectages, dont le désormais célèbre enregistrement de briolage en Berry réalisé par F. Brunot en 1913 (1), deux enregistrement auvergnats par J.D. Lajoux (1964), les enregistrements corses de F. Quilici etc… Plus surprenant, quatre enregistrements actuels viennent compléter cette vision de la tradition musicale française : Luc Charles Dominique au violon, Bernard Desblanc à la boha, le duo de sonneurs Crépillon-Bigot et le bagad Kemper sont donnés comme exemples, au travers d'extraits de CD déjà publiés, de la vivacité de la pratique actuelle. Mais revenons-en aux documents anciens, dont l'intérêt historique et musical ne fait pas de doute et dont la qualité technique est le plus souvent excellente. Le livret nous annonce que les enquêtes des ATP ont permis de recueillir 4000 enregistrements, l'échantillon fourni ici nous met l'eau à la bouche. Bien entendu, les 44 plages de ce CD couvrent très imparfaitement le territoire (Bretagne, Auvergne, Corse, Vendée, Pyrénées sont bien représentées alors que Poitou, Bourgogne, Languedoc-Roussillon, Nord sont totalement ignorés) mais l'image globale qui en ressort (chant, violon, cabrette, accordéon, épinette, galoubet-tambourin, biniou-bombarde, fanfares…) devrait donner, à l'étranger, une image assez représentative de la musique trad. française, aidée par un livret détaillé (en anglais, n'oublions pas qu'il s'agit d'une production US mais qui s'est appuyée sur plusieurs spécialistes français dont Yves Defrance pour le livret).

(1) les enregistrements de F. Brunot ainsi qu'un certain nombre d'autres collectages anciens peuvent être librement téléchargés en mp3 sur le site de la Bibliothèque Nationale de France à l'adresse : http://gallica.bnf.fr/Sonores.htm

Jean-Luc Matte (paru dans le n°84 juillet-août 2002)


  "Tout en chantant
Chansons populaires en Lozère"

Fédération départementale des Foyers Ruraux de Lozère
Durée : 58'32 + 2 recueils de chansons
Recommandé Trad. Magazine

Claude Ribouillault a consacré un papier à cet ensemble livres + CD (T.M. n° 84 p43.) mais il a surtout insisté sur le recueil des textes de Chantoclar et une lecture rapide pouvait laisser croire que le CD était essentiellement consacré aux chansons de cet auteur. Il me semblait donc important de revenir sur ce CD dont les 4 chansons de l'auteur cité ne doivent pas occulter les 18 autres, pour la plupart beaucoup plus traditionnelles. Il faut également saluer la démarche originale qui a présidé à la réalisation de ce CD : non pas une collecte réalisée de l'extérieur, mais à l'initiative d'un foyer rural soucieux de conserver le répertoire d'un de ses membres, initiative relayée ensuite par la fédération des foyers ruraux de Lozère et étendue à d'autres chanteurs, par le biais de ce réseau. Cette genèse originale a produit un document d'une couleur légèrement différente des enregistrements de collectage habituels, des choix également un peu différents, le souci des concepteurs ayant été de privilégier les versions les plus répandues en Lozère, celles au travers desquelles les lozériens se reconnaissent. Et si l'on sent bien que certaines des voix ont été travaillées et ne sont plus les voix brutes de certains collectages plus anciens, cela n'enlève rien à leur chaleur, à leur sincérité.

Jean-Luc Matte (non paru, car plus disponible ce qui est bien dommage, y a-t-il eu des rééditions depuis ?)


Chalibaude
"Je mêne les loups"

Autoproduction : Chalibaude 36 route de le Caillotte 45760 Bouzy-la-Forêt Tel : 02-58-31-72
Durée : 67'50

J.P. Marc vous a présenté ce groupe du Loiret dans le n°85, à l'occasion de leurs 20 ans. Je vous avouerai que je ne les connaissais pas mais que ce CD me donne vraiment envie de les entendre et surtout, d'aller danser dans leurs bals : si leur répertoire ne cherche pas la nouveauté à tout prix, leur choix d'airs traditionnels (Morvan en particulier) et de compositions (dont une valse de Pierre Hervé) dénote une sûreté de goût indéniable (seul l'andro n'est pas vraiment à sa place…). Ajoutons à cela des arrangements bien pensés qui savent renouveler les thèmes sans nuire à la dynamique des danses et tout serait parfait si la prise de son, ou plutôt l'acoustique du lieu d'enregistrement (une église) ne venait gâcher notre plaisir par un son confus et lointain mettant en valeur le moindre défaut d'accord des cornemuses

Jean-Luc Matte (paru dans le n°87 Janv-fev. 2003)


 Montanaro
"Tambourinaire"

Buda records http://www.budamusique.com
Durée :75'31
"Nous avons également reçu"

Un "best of" (comment dit-on en Provençal ?) d'un de nos meilleurs musiciens, pas seulement tambourinaire, un tour d'horizon de ses expériences musicales oh combien variées avec des musiciens de toutes origines (on se souvient de Vent d'Est, il y en eu bien d'autres) … Dommage pour ceux qui ont déjà ses CD et qui s'apercevront en rentrant à la maison que celui-ci ne comporte que deux inédits. L'indication sur la pochette qu'il s'agit d'une compil. aurait été plus honnête de la part de l'éditeur.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°92 nov-dec 2003)

Note : Cette mini chronique a fait réagir l'intéressé dans le courrier des lecteurs du numéro suivant (s'il s'agit bien d'une compilation, elle comporte, outre les deux inédits cités, un certain nombre de morceaux introuvables parus, par exemple sur des CDs qui n'ont jamais été distribués en France.) Je m'en suis expliqué directement avec lui par la suite : le ton de ma chronique était surtout lié au fait que bien plus de bruit était fait autour de la parution de cette compilation que d'oeuvres originales du même musicien comme, par exemple, " Noir et Blanc " paru peu avant et qui n'avait même pas été chroniqué dans Trad. mag., oubli que rattrapa du coup Claude Ribouillault dans le n°93


Duo Ancelin-Rouzier
…"Tornarem Dançar"

Autoproduction : P. Ancelin 6/8 rue Denis Dussoubs 87350 Panazol
Durée : 44'40
Bravos Trad. Magazine

Certains lecteurs nous reprochent de ne dire que du bien des CD que nous chroniquons, mais que pourrais-je reprocher à celui-ci ? C'est un plaisir d'un bout à l'autre que d'entendre le violon de Philippe Ancelin et les chabrettes de Nicolas Rouzier, dans un répertoire quasi-entièrement traditionnel, avec une belle énergie et une cadence irréprochable que ne saurait rendre aucune section rythmique. Et puis, de temps à autre, Nicolas délaisse ses tuyaux pour chanter et l'on découvre qu'il le fait tout aussi bien, notamment "au tralala", avec une voix bien timbrée. Ils assurent suffisamment bien à eux deux pour ne pas avoir eu besoin de faire appel à des invités comme c'est généralement le cas sur ce genre de CD. C'est, avant tout, le jeu de violon de Philippe Ancelin (que l'on avait déjà pu apprécier dans le trio "Les Blaireaux") qui ressort de cet enregistrement, dans ce style inspiré de celui des violoneux corréziens mais adapté également à l'accompagnement, en son temps, par O. Durif, J.F. Champeval et J.F. Vrod. Même à l'écoute au casque, chaque note, chaque ornement, chaque petit écart à la hauteur théorique est à sa place, parfaitement justifié, parfaitement efficace. Le jeu de chabrette de Nicolas n'est pas en reste et il faut vraiment pinailler un peu pour dénicher, un ornement qui pourrait être plus efficace ou un vibré accidentellement un peu trop appuyé : juste de quoi progresser encore un peu à l'avenir…

Alors, que leur reprocher : de ne pas être suffisamment originaux dans le répertoire ou dans un style déjà entendu ? Ce serait oublier qu'on peut faire également de la très bonne cuisine dans les vieilles marmites (je sais, le dicton ne dit pas exactement cela mais ce serait un peu trop réac !). Voilà en tout cas un CD qui mériterait de trouver un distributeur !

Jean-Luc Matte (paru dans le n°98 nov-dec. 2005)

Rappel : voir le CD suivant de Philippe Ancelin

et son CD solo 2016 "Violon du Limousin et autres lieux"

 


"Paris Centre - Cornemuses en Ile de France"

AEPEM 24 rue Villiers de l'Isle d'Adam 75020 Paris aepem suivi de @laposte.net
Durée : 68'44
Bravos Trad. Magazine

Si vous pensez qu'il n'y a pas trente-six bons interprètes de musique du Centre dans la région parisienne, ce CD vous prouvera rapidement le contraire puisqu'ils sont exactement 36 à y avoir apporté leur contribution dont 25 gonfleurs de sacs. Une bien bonne idée que de convier tout ce beau monde à enregistrer (attention, il ne s'agit pas d'une quelconque compilation…), l'idée de départ étant de présenter la pratique actuelle des cornemuses des régions du Centre dans la région parisienne. Au vu de la liste des participants, on constate d'ailleurs que l'émigration régionale perdure toujours : si on montait jadis à Paris faire le maçon ou vendre du charbon, on le fait aujourd'hui, souvent avec la même résignation, pour travailler dans l'enseignement ou aux impôts…Mais parlons plutôt musique car c'est un plaisir d'entendre cette alternance de 14, 16, 18, 20, 23 ou 30 pouces et de cabrettes de tonalités presque aussi variées (et souvent jouées avec chanterelle) sans oublier une touche de bodega, une pincée de chabrette (quel plaisir de réentendre Olivier Daviau…) et un très original duo de musettes baroques invitant à danser une bourrée sur un menuet (aux mains de D. Paris et F Lazarevic rien n'est impossible…pas même l'unisson de deux cabrettes sur une autre plage). Goûtons également l'alternance des formations, du soliste à l'ensemble de cornemuses (La Fraternelle) en passant par les petits ensembles, de cornemuses uniquement ou pluri-instrumentales (quelques accordéonistes et non des moindres, trois vielleux et un violon sont venus prêter main forte par ci par là… ). Concepteurs du projet, Jacques Lanfranchi et Jean-Michel Peru nous avaient offert l'an passé l'intégrale des airs à danser de Bouillet. On est loin ici de la neutralité d'interprétation de ce précédent CD mais ils ont à nouveau fouillé dans les recueils anciens (Millien, Barbillat-Touraine et autres) et les collectages plus récents et/ou invité les participants à jouer ce type de répertoire. Ce CD est donc composé uniquement de traditionnels dont une bonne part n'avaient encore pas été enregistrés, ce qui prouvera aux sceptiques qu'il reste bien davantage que des fonds de tiroirs dans toute cette masse de répertoire à exploiter. Tout cela (et tout ce que je n'ai pas la place d 'écrire) fait que ce CD sera indéniablement un de ceux qui marqueront l'année cornemusicale.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°102 juillet août 2005)


Willy Soulette

 

Cinq Planètes coll. solistes
Dist. L'Autre Distribution
Durée : 58'44
Recommandé Trad. Magazine

Willy Soulette fête ses 40 ans ! Pas tout à fait ceux de son état-civil, mais ceux de sa rencontre avec les musettes du Centre et, pour cela nous offre ce CD. Musicien discret et rigoureux, Willy n'est pas le plus connu de nos cornemuseux émérites et ce CD solo, comme il est de règle au sein de cette collection, est pourtant l'aboutissement logique (et provisoire !) d'un beau parcours commençant dans de grands ensembles (les Gâs du Berry puis La Grande Bande) passant par le Quintet de cornemuses puis le Trio cornemuses puis enfin le duo avec sa compagne chanteuse Solange Panis. Si, en particulier dans cette dernière formation, il use beaucoup des clarinettes, le présent CD est entièrement joué aux cornemuses (14,16 et 23 pouces).

Le répertoire est local, issu principalement de Barbillat-Touraine, Millien, des collectages de R. Pearron ou du répertoire des Gâs du Berry, et Willy s'est juste permis d'ajouter discrètement trois de ses compositions…et un morceau de Transylvanie.

Le style de jeu de Willy Soulette reflète une partie le caractère de celui-ci : son côté sérieux, voire perfectionniste mais imaginatif se traduit par un jeu très technique, variant sans cesse les ornements, ne laissant pas de place au hasard ni à la répétition à l'identique (écoutez ce qu'il sait tirer d'un standard comme la bourrée valsée d'Issoudun). Il pousse si loin ce contrôle de chaque note, de chaque appogiature, qu'il en oublie un peu de se laisser porter par les mélodies et leur balancement propre. Ceci est d'ailleurs accentué par le fait que le répertoire puise principalement dans des mélodies de chansons traditionnelles et que, contrairement au récent CD de Carré de deux, il ne cherche nullement à les convertir en bourrées, valse ou autres danses. Il vous faudra donc quelques premières écoutes pour vous les mettre dans l'oreille est en apprécier ensuite l'interprétation : un CD qui se bonifie au fil des auditions... Willy Soulette est également un personnage plein d'humour mais cela est beaucoup moins évident à traduire dans un tel enregistrement…

Bien que jouant le jeu du CD solo, Willy n'a pu résister à faire intervenir la voix de Solange Panis sur deux plages, juste pour nous faire regretter qu'il n'y en ait que deux, tant le duo fonctionne parfaitement (ce qui n'est plus à démontrer depuis le CD " La petite Laurencine ") et pour nous faire regretter également que sa fille Marion qui manie fort bien ce type de tuyaux, n'ait pas trouvé également un petit coin de mélodie à accompagner.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°106 de mars-avril 2006, par erreur sans la photo de pochette indiquant qu'il était " Recommandé ", ce qui a donné lieu à une petite rectification dans le n° suivant : " je n'ai chroniqué que deux CD dans le dernier numéro mais tous deux m'ont fait longuement hésiter entre Bravos et Recommandé, à tel point que la chronique de celui de Willy Soulette est partie à la rédaction en oubliant de précsier que je vous le recommandais (et plus fortement encore à ceux qui tâtent de ce genre de tuyaux sur poche…) . Rectifions ici cette omission, ne serait-ce que pour vous faire profiter de la sympathique pochette… "


Yan Cozian

 

Cinq Planètes coll. Solistes
Dist. L'Autre Distribution
Durée : 59'17
Bravos Trad. Magazine

Après D. Paris à la cabrette, P. Molard au bagpipe et W. Soulette à la musette du Centre, Yan Cozian est le quatrième de nos joueurs de cornemuse à relever le défi de cette désormais prestigieuse série d'enregistrements solistes. Contrairement aux trois précédents, Yan n'était pour l'instant guère connu hors de sa région et sa discographie était également restée régionale (et pédagogique). Il est pourtant, depuis quelques années déjà, l'un des acteurs les plus actifs du petit monde boha (comme enseignant, au sein de Bohaires de Gascogne ou comme président de la Fédération landaise de musique et danses tradtionnelles) .C'est au pied de la lettre qu'il respecte la consigne de cette collection : une heure de boha landaise sans le moindre accompagnement, sans le moindre artifice, juste les changements de tonalité d'une plage à l'autre. Un pari risqué que Yan réussit pleinement à relever en laissant de côté virtuosité et technique apparente et en nous offrant simplement une heure en prise directe avec son expression personnelle, dans une quasi intimité qu'évoque bien le plan rapproché de ses doigts en pleine action sur l'instrument au dos du livret (1). Son jeu est très mélodique, avec une utilisation principalement harmonique des deux notes du " bourdon " (parfois presque une seconde voix..) et si je sais que certains sont partisans, sur cet instrument, d'un jeu davantage axé sur la rythmique, un peu à l'image du style hongrois ou slovaque, nul ne pourra nier que congos, rondeaux valses et polkas balancent bien et donnent envie de se lever de sa chaise. Quelques mélodies de chansons viennent, par ailleurs, prouver que l'instrument peut être utilisé hors du bal. Gageons que ce CD va susciter quelques vocations de bohaires…

(1) on ne soulignera jamais assez la qualité des photos de Christian Lebon pour cette collection : qualité technique mais, surtout, aptitude à faire transparaître la personnalité de chacun des musiciens au travers d'un simple cliché…

Jean-Luc Matte (paru dans le n°107 mai/juin 2006)

Rappels :

Au sein du groupe Pass'Aires en 2011 : lire la présentation ici

Yan été également l'initiateur du colloque des 20 & 21 mai 2006
à l'Abbaye d'Arthous - Hastingues (40)
organisé par Conseil Général des Landes http://www.landes.org qui en a publié les actes sous le titre La "Cornemuse landaise - La Boha"

"Cornemuses landaises", CD collectif des groupes et musiciens landais utilisant l'instrument, réalisé par le Conservatoire des Landes et, en particulier Yan Cozian. Lire la chronique ici

en 2013 réalisation du double DVD "Boha ! "L'incroyable histoire de la cornemuse landaise - Au coeur des Landes"
 

Une plage sur le double CD consacré au Pipasso

Bohas Orchestra "Cornemuses landaises - couleurs gasconnes" 2018, chronique à venir


Les Thiaulins de Lignières
"Nohant"

Durée : 45'01
Bravos Trad. Magazine

Un nouvel opus des Thiaulins, voilà forcément un événement ! Le titre évoque naturellement George Sand, mais n'allez pas croire que nos berrichons ronronnent tranquillement sur quelques poncifs locaux car plusieurs surprises sont au rendez-vous ! La première est, justement, d'apprendre qu'outre la célèbre " bourrée d'Aurore Sand ", il existe d'autres airs traditionnels collectés par George Sand, sa famille ou ses proches (dont F. Chopin). Le CD nous propose de les écouter et de découvrir maintes mélodies inconnues ou variantes. La seconde bonne surprise tient aux arrangements qui jouent encore avec le thème du CD en nous offrant des interprétation presque " de salon " de ces airs traditionnels : oubliez l'ambiance des bœufs de la fête du Plaix, Mic Baudimant et ses compères sont invités chez la Dame de Nohant et savent tenir leur rang ! Il s'agit naturellement d'une inspiration et en aucun cas d'une quelconque reconstitution (encore moins d'une caricature !) et ces arrangements, très écrits (par Gilles Chabenat), les vielles se font un peu violons, où les musettes soignent leurs polyphonies et où les percussions se font discrètes, marient tradition, clins d'œil à la musique classique mais également pratique actuelle de nos instruments fétiches dans leurs formes contemporaines. La troisième surprise, vient de la qualité d'interprétation, non pas que j'ai pu douter un instant du talent des musiciens présents, certains bien connus et d'autres n'ayant quasiment rien à leur envier dans la qualité de leur jeu ou de leur chant, mais la mise en place est d'une précision rigoureuse et dénote une vraie direction d'ensemble. Si les arrangements ne laissent généralement qu'un instrumentiste par voix, les rares passages avec jeu en pupitres, voire chant à l'unisson, savent conserver à la fois précision et expression. Je n'ai qu'un petit regret : que le livret n'en dise pas davantage sur l'origine de chaque morceau mais le mieux serait encore que Mic nous conte tout cela de vive voix…

Jean-Luc Matte (paru dans le n°108)


Alain Célo
"Espaces désertiques. Le Graoully, dragon messin"

Parnassie Editions - Chemin de St-Martin - Quartier Chante Coucou - 84160 Cucuron
jmi.robert suivi de @laposte.net
Durée : 52'20

Certains cornemuseux d'entre vous jouent sans doute " La Valse parisienne " du répertoire d'Avalanche Cie mais ignorent qu'Alain Célo qui a composé cette petite mélodie est, outre un joueur de musette du centre en amateur comme nombre d'entre nous, altiste à l'orchestre philharmonique de Lorraine et lauréat de quelques prix de composition savante. Alain Célo ne mélange pas trop les genres et ce CD n'est donc pas un CD de musique traditionnelle mais plutôt contemporaine, interprété par l'ensemble Stravinsky sous la direction de J.P. Pinet. Toutefois (sinon je ne me permettrais pas d'en faire état dans ces colonnes), les " Espaces désertiques " qu'il décrit musicalement ici appellent naturellement quelques discrètes réminiscences des musiques de leurs peuples (un rythme de darbouka par ci, un rythme impair par là…) et, surtout, un traitement musical qui ne devrait pas heurter vos oreilles. Il n'y a guère que le mouvement sur l'Antarctique qui sonne réellement comme du contemporain pur et dur. Quant à la seconde pièce, elle puise dans le légendaire local et nous conte, avec un côté un peu didactique et un récitant théâtral (enregistrement en public), l'histoire du Graoully, l'équivalent lorrain de la Tarasque et de quelques autres dragons… Sur une musique qui, comme le reconnaît lui-même Alain Célo, donne plutôt " dans les ambiances cinématographiques ", en un peu moins convenu tout de même….

Jean-Luc Matte (paru dans le n°112 de mars-avril. 2007)


Julien Barbances
"Approchez pour entendre"

AEPEM 24, rue Villiers de l'Isle-Adam 75020 Paris. aepem suivi de @laposte.net
Durée : 55'09
Bravos Trad. Magazine

Il s'est fait un peu attendre mais cela en valait le coup : Julien Barbances nous offre ici un superbe CD de musette du centre. S'il est seul a l'affiche, ce n'est pas vraiment un CD solo puisqu'il utilise les possibilités du multipistes pour jouer en polyphonies de musettes, s'accompagner au violon, à l'oud ou aux percussions. Et que ceux qui doutent de l'efficacité du procédé écoutent ici l'accord remarquable, l'entente musicale parfaite entre Julien... et Julien. Ajoutons également la présence à la vielle de Patrick Bouffard et Grégory Jolivet sur deux plages chacun. Cet album s'écoute donc davantage comme celui d'un duo ou trio que comme un disque solo. Julien Barbances est décidément un musicien multi-facettes car ce CD est beaucoup plus traditionnel que ce qu'il réalise, par exemple, avec La Machine. Pas de rythme détourné ici, pas de chant non plus, mais un sens de la cadence et du tempo, une sonorité, une maîtrise instrumentale qui, tout à la fois, vous donne envie de remettre les doigts sur vos tuyaux pour tenter d'en faire autant et produire d'aussi belles choses et, qui, d'un autre côté, vous écoeure un peu de tant de facilité. Si ce CD est plus traditionnel, il ne manque toutefois pas de petites trouvailles par ci par là, d'audace également, à l'image de ces deux plages jouées en pur style cabrette qui devraient faire date et donner envie à bien d'autre manieurs de 16 pouces d'en faire autant (il va y avoir du monde en stage chez D. Paris….). Il n'y a qu'une chose qui me fait regretter d'y mettre les bravos : troubler ainsi, par le logo bleu et rouge, la belle pochette noir et blanc.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°115 sept-oct 2007)

Rappels : Plusieurs plages solo sur le double CD consacré au Pipasso

Voir également les albums du groupe La Machine
CD La machine : Les rodeurs

Et, naturellement ceux de la Fraternelle dont il est l'arrangeur et co-directeur musical


Stéphane Mauchand Gérard Chazot
"Traces"

Autoproduction limitée à 114 exemplaires
stephane.mauchand suivi de @wanadoo.fr
Durée : 52'25 mn
Recommandé Trad. Magazine

Stéphane Mauchand, à ne pas confondre, comme je l'ai fait longtemps, avec l'autre cornemuseux presque homonyme Stéphane Méjean, a déjà pas mal d'expériences musicales derrière lui et se plait à continuer à multiplier celles-ci. Dans le registre trad. on a pu l'entendre au sein de Valspareille, et, l'an passé, il nous a offert, en tout petit tirage un bel ovni (oeuvre vraiment novatrice et imprévisible) dénommé "Lucioles". Il récidive dans le tirage confidentiel avec ce CD de style plus conventionnel et acoustique, tiré à 114 exemplaires seulement !. Il y joue des cornemuses naturellement, mais également de la flûte traversière et de quelques autres tuyaux. Tout cela en duo, sans autre invité, avec Gérard Chazot qui manie fort bien les guitares (acoustiques sauf sur l'une des deux dernières plages, celles-ci étant deux reprises plus " musclées " de deux des neuf premières plages).Toutes les mélodies sont des compositions de l'un ou l'autre, des airs qui se coulent bien dans l'oreille qui permettent aux deux musiciens de s'exprimer mais qui n'ont pas souvent cette étincelle, ce petit grain d'originalité qui fait flasher l'auditeur dès les premières écoutes. Stéphane a un très beau jeu de cornemuse, plein de ressources, mais, contrairement à " Lucioles ", il n'y a ici qu'un petit passage sur la plage 5 qui fait appel à des sonorités inhabituelles sur une musette. Son jeu sur les autres instruments n'est pas inintéressant, mais moins exceptionnel. Gérard Chazot assure un fameux travail, le plus souvent en accompagnement naturellement, parfois plus en avant, mais, dans ce cas, toujours en gardant une partie rythmique derrière la ligne plus mélodique, juste de quoi donner envie d'en entendre davantage dans ce registre. Dépêchez-vous il n'y en aura pas pourtout le monde...

Jean-Luc Matte (paru dans le n°116 nov. Dec. 2007)


Toad

Genre : Auvergne qui frotte
Pochette cartonnée sans livret
8 titres
Durée : 64'00 dont 27' de bourdon

TT

Soyons clair d'entrée de jeu, les TT ci-dessus se veulent une moyenne (forcément insatisfaisante) entre ce qu'en penseront ceux qui ne supporteront pas l'écoute de ce CD et ceux qui apprécieront une démarche originale et qui s'assume pleinement. Celle-ci consiste à interpréter un répertoire à danser quasi exclusivement traditionnel et géographiquement ciblé (répertoire des violonneux du Massif Central) dans une esthétique qui ne craint ni les dissonances tenues ni les timbres très marqués allant jusqu'aux grincements. Yann Gourdon n'est pas du genre à accorder sa vielle dans le style " je ne veux entendre qu'une seule corde " : au contraire, il aime le son bien râpeux, l'accord qui frotte, à l'image de ces joueurs de mezzued tunisiens qui rectifient leurs anches lorsque, par hasard, les deux tuyaux convergent contre leur gré vers l'unisson. Mais les choix harmoniques qu'il opère en compagnie de Pierre-Vincent Fortunier (violon, cornemuse…) et Guilhem Lacroux (guitare électrique) poussent bien au-delà de ces accords volontairement imparfaits ou des gammes non tempérées et vont parfois jusqu'à quasiment opposer les bourdons à la tonalité du morceau. Le résultat ne saurait générer l'indifférence et touchera forcément l'auditeur qui appréciera une violence musicale quasi à l'égal de celle d'un groupe de métal mais dans une esthétique toute différente… ou qui coupera rapidement le son de sa platine saisi par un certain malaise. Si je me permets d'affirmer cela c'est que j'ai fait quelques tests sur mon entourage… Mais il me faut tout de même nuancer : certaines plages finissent par être plus appréciées après plusieurs écoutes et selon le contexte de celles-ci. Comme ce type de démarche se doit être menée à fond, il nous offrent en dernière plage, près de 27 minutes de bourdon : non pas à la manière totalement unie des monochromes de Klein, mais plutôt en camaïeu changeant et plein de nuances : moins conceptuel qu'on ne pourrait le craindre...

Autoproduction http://www.cheztoad.fr

Jean-Luc Matte (paru dans le n°126 juillet août.2009)

Rappel : voir chronique de Faune avec G. Lacroux


Minim Trio et Pata Troyes
"Folk en fleur"

Autoproduction : Tradact 14, rue Beaulurey 10800 Moussey tradact@tradact.fr
Durée : 35'58
Recommandé Trad. Magazine

En voyant la pochette je me suis dit que c'était une bonne idée que de se partager la réalisation et l'édition d'un CD entre deux groupes à raison de cinq plages chacun, frais de réalisation divisés par deux et occasion de ventes en bal multipliées par deux. Mais en y regardant de plus près, ce n'est pas exactement de cela qu'il s'agit ici puisque les deux membres principaux du Minim Trio, Gabriel Bourgoin (diato et violon) et Nicolas Hampe (diato, saxo) semblent également être les leaders de Patatroyes et les compositeurs de huit des dix titres. Si la présentation du CD fait un peu amateur et si leur CV est encore maigre, la musique (à danser) de Minim Trio est d'une belle maturité, notamment au diato, avec une belle appropriation de diverses influences diatonistiques actuelles, dans un style souvent intimiste et soutenu par un fin contrebassiste. Si le violon sait se marier au diato, regrettons une intervention à la bombarde d'un niveau très en dessous du reste. On pourrait supposer que Patatroyes n'est qu'une version un plus " habillée " du duo Bourgoin-Hampe, cinq musiciens venant remplacer le contrebassiste. Mais, en réalité, le duo s'efface un peu pour laisser s'exprimer le reste du groupe, ce qui nous vaut quelques passages intéressants et d'autres aspects un peu moins inspirés et, dans l'ensemble, une moindre impression d'unité et d'originalité, sans doute à cause d'une rythmique un peu trop marquée.

Jean-Luc Matte (paru dans le N°119, mai-juin 2008)


Mouchafou

 

 

Bémol Productions Ref :BEMO022 http://www.bemolproductions.com
Durée : 45'57
Bravos Trad. Magazine

Lorsque Fabien Dubarre s'est lancé il y a quelques années dans l'aventure de l'Estaminet des Damoiselles, les amateurs de cornemuses ont pu craindre qu'il ne délaisse l'instrument pour le torchon à verres mais cet album nous prouve qu'en plus d'avoir créé un lieu déjà mythique en Nord Pas-de-Calais, il continue à caresser les tuyaux. Rappelons qu'il a réalisé une grande partie de l'enregistrement du CD de la méthode de ce dernier, témoignant ainsi d'une technique irréprochable. Le présent CD prouve qu'il n'a pas que la technique mais également un phrasé et des vibrés superbes avec parfois des accents "montbéliens" (écouter notamment " Le brandevin "). Si je commence par vous parler de lui au sein de ce quatuor, c'est qu'il y tient le devant, le violon de Christophe Declercq venant souvent doubler la cornemuse, remettant ainsi à l'honneur le jeu à l'unisson, et n'hésitant pas, non plus, à glisser quelques harmonies. Derrière eux, Caroline Aiello au diato assure l'assise harmonico-rythmique (avec tout de même quelques passages un peu plus solistes, notamment dans les intros) et Julien Biget soutient celle-ci, à la guitare naturellement, le plus souvent en rythmique ce qui est un peu frustrant lorsque l'on sait ce qu'il peut faire par ailleurs sur son instrument… Tout cela sur de belles compositions des 4 musiciens, de leurs amis et quelques trads tout de même. Un CD que l'on attendait depuis de longues années, de facture finalement assez classique, mais pourquoi bouder son plaisir lorsque c'est aussi bien réalisé ?

Jean-Luc Matte (paru dans le N°121, sept-oct. 2008)

Rappels :

Fabien Dubarre "La cornemuse - collection musique traditionnelle Un instrument, un artiste" 2012

Méthode de Bernard Boulanger "Jouer de la cornemuse" (CD enregistré par Fabien Dubarre)

Christophe Declercq : "Histoire de violons" en duo avec Margaux Liénard, un album ou intervient également Julien Biget : voir la présentation


et voir la page hommage à ce musicien trop tôt disparu

Julien Biget : voir à partir de la chronique de La Bergère "Etreintes"

 


La Piposa

"Havlendans - La Piposa joue la Flandre"

16 titres
Livret 8 pages
Durée : 63'10
TTT

Inutile de vous rappeler que la Piposa est une école de musique traditionnelle bien connue dans le Nord, fondée par Bernard Boulanger et dont certains élèves sont désormais des références : vous avez lu tout cela dans le numéro 126. Ils nous avaient déjà gratifié d'un premier album collectif en 2000 ("Rue du Fief") et il fort probable que les élèves (voire les formateurs) se sont grandement renouvelés depuis. Ce type d'album se doit de surmonter un certain nombre d'écueils et la Piposa s'en sort bien : l'effet fanfare n'est pas totalement absent (il faut bien faire jouer un maximum d'élèves et la prise de son est assez globale), mais limité par un bon niveau technique et une bonne direction qui insuffle une vraie musicalité. Le jeu en grand ensemble est, par ailleurs, contrebalancé par de nombreux passages en effectif plus réduit. Le répertoire, quant à lui, fait appel, avec bonheur, au local et apparaîtra donc comme original à bien des oreilles, avec des couleurs qui ne sont pas sans évoquer certains " Volksorkest " flamands bien connus, même si l'effectif des cuivres est, ici plus limité. A noter une plage avec récit qui m'a fait me demander si je n'étais pas passé par erreur sur l'album de Terre-Neuvas…

Jean-Luc Matte (paru dans le n°127 sept-oct.2009)

Rappel : "Rue du Fief"


Voir également Méthode de Bernard Boulanger "Jouer de la cornemuse" (photo juste ci-dessus)

et l'album des Pantouflards "Black Savate"

Voir également Le Beau Milo (avec Etienne Boulanger) "Le bal musette du Beau Milo" (2017)


Bernard Poplineau
" Ardennes profondes
Région Champagne-Ardenne"

Autoproduction : 16 rue des Blancs-Lavoirs 08450 Haraucourt

Il est des régions dont la présence dans l'édition discographique rayon " musiques traditionnelles " est plus que discrète, aussi est-ce toujours avec curiosité que l'on aborde un CD comme celui-ci, consacré au répertoire de Champagne-Ardenne. Lorsque l'on est quasiment seul en lice autant l'afficher bien haut, l'argument régionaliste restant certainement le meilleur argument de vente pour ce type de production , XXX ne s'en prive pas dans le titre et sous-titre de son disque. La pochette mentionne même l'utilisation d'une " cornemuse champenoise " ce qui est un peu osé vu ce que l'on peut connaître sur une éventuelle tradition de cornemuse dans cette région... Question contenu musical on peut qualifier B. Poplineau de guitariste-chanteur ce qui devrait vous donner une petite idée de l'ambiance sonore qui, malgré la présence d'accompagnements sagement assurés par deux compères à l'épinette, vielle-à-roue, cornemuse, diatonique et autres instruments trad. reste résolument d'une esthétique " guitare ". Mais faute d'une tradition locale parvenue jusqu'à nous dans cette région peut-on lui reprocher de faire du post-68-tendance-auteur-compositeur-interpète plutôt que du néo-breton ou du néo-bourbonnais ? Saluons un répertoire relativement original, en particulier les chansons en patois pour lesquelles B. Poplineau se montre le plus convaincant (certaines fleurent bon le XIXème finissant). Il est par ailleurs dommage qu'il ne cite pas ses sources : il est toujours plus correct de citer, selon les cas, le nom des personnes collectées ou celui des auteurs des ouvrages de collectages consultés. De nombreux groupes préfèrent d'ailleurs laisser penser qu'ils ont eux-mêmes collecté leur répertoire alors qu'il n'y a aucune honte, bien au contraire, à valoriser le répertoire immense, collecté avant nous : il existe un équivalent du Barbillat-Touraine dans presque toutes nos régions.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°56 nov. Dec. 1997)


L'Arbre-Mémoire

Pôle des musiques actuelles 54 - 20 rue du Sgt. Blandan 54000 Nancy
Durée : 50'12

Décidément Pascal Burgain, et ses collègues d'Idyll, sont infatigables : lorsqu'ils n'animent pas les bals de l'Est, lorsqu'ils n'organisent pas Tradanse et lorsqu'ils n'enregistrent pas en leur nom ou pour les enfants avec "Marchand de sable", ils assurent la réalisation, sous l'égide de l'ADDAM locale, d'un CD offrant à divers musiciens trad. du département de s'exprimer sur le thème de l'arbre à travers musique et contes. Ceci nous permet de retrouver Dimitri Dupont, compositeur et multi-instrumentiste désormais reconnu, la flûtiste Julie Garnier qui joue avec lui dans Taloche et que vous avez sûrement entendue cette année dans le parc de St-Chartier, mais également Pascal Minne et Les Fayards dont c'est à ma connaissance le premier enregistrement. Ceux-ci nous offrent d'ailleurs une version particulièrement sentie de la légende du diable violoneux ("Le lac de la Maix") qui a elle seule vaut l'écoute du disque.

Jean-Luc Matte (paru dans le n°74 nov-decembre 2000)


d'Lichtbéble
"Les Lucioles"

 

Autoproduction, contact : dlichtbeble suivi de @free.fr
Durée : 53'54
Recommandé Trad. Magazine

Je suppose que peu d'entre vous ont entendu parler de Louis Pinck, cet abbé qui fut, pourtant l'un des grands collecteurs français du milieu du XXème siècle. Mais ayant principalement prospecté dans la partie germanophone du département de la Moselle (1), son oeuvre, publiée en plusieurs gros volumes aujourd'hui malheureusement introuvables, est davantage connue par les allemands que par les français. D'Lichbéble (les lucioles) est un quartet de la région de Bitche, qui nous offre un CD entièrement puisé à cette source et joliment interprété dans un style qui nous rappelle davantage celui de la chanson alsacienne des années 70-80 avec guitare, mandoline, accordéon et flûtes que celui des musiques trads actuelles, mais qui touchera ainsi certainement davantage le public local. Cette interprétation prouve également, d'une part, que ces chansons sont finalement intemporelles et, d'autre part, que, tout comme l'alsacien, le platt peut s'avérer très chantant. Et ne nous y trompons pas, pour parvenir à ce résultat aux allures si naturelles, le quartet a certainement du réaliser un gros travail sur chaque mélodie et chaque texte.

 

(1) rappelons que seule la partie nord de ce département est germanophone (Thionville, Bouzonville, Forbach, Sarreguemines, Bitche…), la ville de Metz ayant, elle, toujours été située en région de parlers romans. La langue en question, dénommée " platt " par ses pratiquants et " francique " par les universitaires. Elle est différente de l'alsacien et se répartit en plusieurs variantes d'est en ouest. Elle est encore très usitée de manière naturelle par les population locales et n'a donc généré que très peu de mouvements de sauvegarde militants, contrairement à d'autres langues de l'hexagone.

Jean-Luc Matte (paru dans le N°120, juillet-août. 2008)


Christian Anneix
"Biniou en liberté"

Keltia Musique http://www.keltiamusique.com
Ref : KMCD 196
Durée : 70'58
Bravos Trad. Magazine

Voici indubitablement un album qui sort du lot par une démarche originale et pourtant tellement évidente qu'on s'étonnera de ne pas l'avoir connue plus tôt. Au sein du couple biniou-bombarde, dame bombarde s'est permis nombre d'infidélités : on se souvient qu'après guerre, elle délaissa presque totalement son compagnon historique pour un grand gaillard écossais aux bourdons bien dressés ; plus tard, est-ce pour se repentir qu'elle fréquentera les églises à la tribune d'orgue ? Enfin elle mènera nombre de groupes de fest-noz avec batterie, saxos, guitares et autres instruments actuels mais sans son compère. Il n'était donc que justice que ce dernier, le petit biniou, le biniou ancien, se défasse de ses complexes (liés à sa petite taille et à sa voix soit disant trop aiguë) pour aller vivre sa vie de son côté, pour fréquenter du monde, pour se frotter à des répertoires inconnus. C'est ce que nous propose ici Christian Anneix et, grâce à son jeu précis et juste, c'est une vraie réussite qui vous fera réellement redécouvrir cet instrument, prendre conscience qu'il s'agit finalement d'une cornemuse comme une autre, avec sa couleur particulière, mais capable de jouer aussi à l'aise dans une suite québécoise, un branle Renaissance, des traditionnels espagnols ou des compositions méditerranéennes de L. Charrier (des choix de répertoire qui ont le bon goût de ne pas utiliser l'alibi celtique…). Reconnaissons tout de même que la balance ne semble pas toujours naturelle : soit C. Anneix a adouci ses anches, soit le mixage a rééquilibré les niveaux mais le résultat en vaut la chandelle et le biniou mêle à merveille cette sonorité à celles des instruments et voix des nombreux invités (de marque…)

Jean-Luc Matte (paru dans le N°120, juillet-août. 2008)

Rappels :

Avec Jean Baron (parmi bien d'autres) :

Hommage à Theo le Maguet

et sur le double CD-DVD des 1ères Euroceltes à Strasbourg
CD du festival Euroceltes 2006


Luskan
"Noz-Terre"

Autoproduction http://nialab.free.fr
Ref : LSK008
Durée : 54'21
Recommandé Trad. Magazine

Voici un groupe breton qui possède un son original puisque le CD est principalement mené par un couple vielle-à-roue/bombarde. Et pourtant ils nous viennent de Loire Atlantique et non des Côtes d'Armor où se jouait traditionnellement l'instrument. Pour ne rien gâcher, la vielle a un beau son d'instrument bien réglé, avec un chien précis, et elle est servie par une bonne prise de son. Ce n'est d'ailleurs pas la seule originalité instrumentale de Luskan : le CD s'ouvre et se clôt sur une sonorité qui pourrait passer pour celle d'une harpe à cordes métalliques, mais le livret nous indique qu'il s'agit en réalité d'une cithare : bluffant.

Visiblement Luskan est un groupe de fest-noz, pas trop connoté géographiquement puisque se trouvent à son répertoire aussi bien des maraîchines qu'une suite du Pays Fisel, une suite de Loudéac, des polkas ou l'inévitable cercle circassien. Pour la petite histoire, s'y trouve même un morceau polonais joliment chanté et un émouvant cantique de Noël. Leurs arrangements savent varier fréquemment les sonorités et ils assurent aussi bien les passages dépouillés que les danses sur fond de guitare électrique saturée (sans excès, rassurez-vous…)

Si leur répertoire reprend quelques classiques, de belles variations viennent en renouveler l'intérêt et on notera, pour l'anecdote, l'utilisation de l'abréviation [n-c] dans la liste des morceaux, signifiant " le groupe ne connaît pas le titre de cet air traditionnel, entendu quelque part "…Ca ne s'invente pas…

Jean-Luc Matte (paru dans le N°119, mai-juin 2008)


Jorj Botuha, Pascal Guingo, Philippe Quillay et Pascal Marsault
"Plijadur"

Ed. Alain Pennec http://www.alain-pennec.com dist Coop Breizh
Durée : 60'25
Ref : CD JB10508/1
Bravos Trad. Magazine

Si vous avez vu les affiches publicitaires de " Produit en Bretagne ", dans le métro ou ailleurs, vous avez été capable de traduire le titre de ce CD : Plijadur signifie tout simplement " plaisir ". Et avec la même efficace simplicité, la belle photo de pochette nous indique que nous avons affaire à trois sonneurs : bombarde, biniou koz et biniou braz ainsi qu'à un organiste. Jorj Botuha est bien connu comme facteur mais également pour un palmarès en concours qu'il serait trop long de vouloir détailler ici. Citons tout de même, parmi ses 14 titres de champion de Bretagne, ses deux premiers prix à Gourin en 2007 : en couple koz avec Philippe Quillay et en couple braz avec Pascal Guingo. Ce sont naturellement ces deux musiciens qui l'accompagnent ici, alternativement en couple, mais également en trio bombarde-koz-braz, rééditant une formule inaugurée par P. Molard et peu reprise depuis. Le répertoire qui nous est offert a été recueilli en pays vannetais, notamment auprès d'Yvon Palamour, ébéniste et musicien dont le livret nous rappelle que Jorj Botuha lui doit une bonne part de sa formation.

L'enregistrement dégage avant tout une grande impression de rigueur (ce qui est bon signe de la part d'un facteur d'instruments...) : rigueur notamment dans les trios ou les deux binious semblent ne faire qu'un, rigueur dans le choix du répertoire (bien documenté dans le livret), rigueur des tempis, des cadences etc. Mais ce sérieux cache tout de même des audaces discrètes, tels ces airs du répertoire de Jean Magadur interprétés sur des copies de ses instruments, anches en buis et tempérament ad'hoc ou une composition aux très légères colorations maghrébines..De bien la belle ouvrage….

Jean-Luc Matte (paru dans le N°121, sept-oct. 2008)


Bagad Brieg - Shotts & Dykehead Caledonia Pipe-Band
"La Boum Ecosse"

Voir en page Grande-Bretagne

Picotage
"Noël nouveau est venu"

FolkClub Ethnosuoni : http://www.folkclubethnosuoni.com
Durée : 40'26
Recommandé Trad. Magazine

Pour une fois, cette chronique d'un CD de Noël devrait être publiée dans les temps et, pour cela, c'est en plein mois d'août, dans une voiture surchauffée, que je l'ai écouté pour vous en parler ; pas vraiment les conditions optimales donc mais avec un peu d'imagination et grâce au talent de ces italiens de nord qui se piquent d'interpréter des Noëls traditionnels français j'ai passé un bon moment tout de même. Le choix des Noëls témoigne d'une vraie recherche et si l'un ou l'autre est bien connu des amateurs de musique trad., j'en ai découvert ici que je n'avais encore jamais entendu (et les sources sont citées dans le livret). Vielles à roues, musettes 14, 16 et 20 pouces, claviers, la partie instrumentale de cet enregistrement se tient parfaitement. Il est vrai que Gabriele Coltri, par exemple, commence à avoir une solide expérience (Calicanto, Marusic…) et son intérêt pour nos musiques est notoire et pas tout récent (sinon comment aurait-il trouvé ce nom de groupe ?). J'ai quelques réserves sur la partie vocale, non que la chanteuse Gloria Moretti manque de talent, mais son style de chant, ne s'adapte pas toujours parfaitement au répertoire et à langue française, avec des fin des phrases que l'on aimerait plus retenues, le résultat est d'ailleurs plus convaicant lorsqu'elle donne un peu plus dans un style lyrique. Voilà en tout cas des italiens qui connaissent certainement bien mieux certaines de nos traditions musicales que la plupart de nos concitoyens qui se targuent de leur nationalité…

Jean-Luc Matte (paru dans le n°104 nov-dec. 2005 déjà précédemment chroniqué par I. Devaux dans le n°84)

Rappels :

- Picotage "Je n'irai plus aux champs" : voir ci-dessous

- voir ma page consacrée à la discographie de la période de la nativité en musiques traditionnelles


Picotage
"Je n'irai plus aux champs"

Ma dernière chronique à paraître (rédigée bien avant l'été 2009 mais mystérieusement jamais publiée, dommage pour le Bravo que je leur avais décerné...)

FolkClub ethnosuoni http://www.folkclubethnosuoni.com/
ES 5376
Durée : 54'55
Bravos Trad. Magazine
qu'ils n'ont jamais pu utiliser car chronique non publiée...

Picotage est un groupe italien mais, comme leur précédent opus (1), celui-ci a parfaitement sa place dans la rubrique " France " puisqu'il est non seulement consacré au répertoire Centre France, mais avec un style et une technique qui n'ont rien à envier à nos meilleurs groupes locaux. C'est toujours un plaisir de chroniquer un CD ou intervient Gabriele Coltri puisqu'il progresse à chaque enregistrement, mais cela va désormais s'avérer plus difficile puisqu'il atteint le niveau des meilleurs cornemuseux. Il est ici accompagné de deux compères (Walter Rizzo et Marc Novara) maniant avec le même bonheur vielles que musettes. Ils sont épaulés par un quatrième larron (Daniele Caldarini) à l'orgue qui donne une dimension supplémentaire à ces polyphonies. Il est juste dommage que les orgues employés ne soit pas acoustiques, surtout sur une ou deux plages où cela sonne un peu trop synthèse à mon goût. Mais c'est bien le seul reproche que je saurai faire à cet enregistrement où les deux chanteuses (Marie Antonazzo et Nadia Marolli) nous interprètent sans accent des collectages de Milien sortis de derrière les fagots (et oui, même sous cet aspect déchiffrage, il peuvent en remontrer à certains groupes de chez nous…). Le livret bilingue italien-français est parfaitement documenté et Gabriele a complété le répertoire par quelques compositions à lui tout à fait dans l'esprit. A classer dans votre discothèque à côté des enregistrements de La Chavannée…

(1) consacré au répertoire de Noël, cf TM. N°104 (ci-dessus)

Jean-Luc Matte

 

Rappel : Gabriele Coltri en trio avec Tiziano Menduto et alberto Morelli : "El Petun des Diaûl" 2008

"Siamo qui a cantar la Stéla - noëls, carols, stelle" 2018 (chronique à venir)


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