Moteur de Recherche :
"Je suis née en Allemagne" voici un titre tout à la fois autobiographique (1) et courageux lorsque l'on sait que la pratique trad. d'outre-Rhin n'a pas vraiment une bonne image en France (2). Lisa va jusqu'à enfoncer encore sympathiquement le clou en mettant en couverture une photo en costume. Vive les musiciennes qui assument !
Pour ceux qui auraient raté des épisodes, Lisa Wolf est est effectivement née an Allemagne et fut tout d'abord connue en France pour sa participation à la Fraternelle, puis comme compagne de Julien Barbances et, enfin, comme réparatrice d'instruments à vent, quelquepart en Berry...
Elle manie avant tout les cornemuses et cet album, quelle assume quasi toute seule (3), nous prouve à nouveau avec quelle maîtrise elle sait le faire et ce dès la seconde plage (la première est une très courte intro), avec une scottisch irréprochable tant pour la composition que pour la cadence, les vibrés, les ornements etc. Suit une jolie mazurka qui tient davantage de la polska, puis, seule épine dans le pied de cet album, une danse allemande dont l'interprétation est un peu plombée par son jeu au diato et tire à la caricature (surtout avec la partie chantée et les trilles sysématique de clarinette), alors que l'on sent que le jeu de la cornemuse aurait très certainement pu faire seul un meilleur sort à cette mélodie. Heureusement les bourrées d'Auvergne qui suivent avec leurs petites variations binaires viennent vite faire oublier ce seul bémol au sein de ce bel album. Signalons encore une plage à la 20 pouces (à perce à l'ancienne par N. Galleazzi) jouée sans vibrato, ce qui demande une parfaite maîtrise de la justesse (elle vibre par contre à la16 et un tout petit peu plus sur une autre plage 20 pouces). Mentionnons également des plages en polyphonies de cornemuses à deux ou trois voix par la grâce du multipistes, dont une très jolie au hümmelchen dont le son rappelle celui des small-pipes. Naturellement ce type d'enregistrement en re-recording ne permet pas les échanges d'un vrai jeu en duo, mais il assure par contre que les différentes voix sont jouées avec la même perception de la mélodie et cela s'entend... A propos de voix, Lisa chante également, quasiment sans accent, en polyphonie également, avec une voix assez nature qui lui laisse donc pour l'avenir une petite marge de progression. A quand d'ailleurs un album en duo avec Julien ? A moins qu'ils n'attendent qu'Emmanuel et Anatole ne soient en âge pour assurer un quartet... En attendant nous aurons plaisir à écouter et réécouter celui-ci qui aurait mérité davantage qu'une autoproduction.
(1) Rappelons qu'il s'agit du titre d'une chanson traditionnelle, naturellement présente sur cet album...
(2) Qui d'entre vous parmi ceux qui fréquentent Le Son Continu, ont pris la peine d'essayer les instruments de Bodo Schultz ou d'écouter les très beaux duos de Meritt et Mathias sur le stand de ce dernier ?
(3) Julien accompagne au violon sur une plage et aux percussions sur une autre et l'accordéoniste David Saam intervient sur une troisième.
Autoproduction, contact : contact suivi de atelier-wolf.com
On n'aborde pas un album de Valentin Clastrier comme celui de n'importe qui : tout d'abord parce que sans jamais pratiquer la musique traditionnelle (1), Valentin Clastrier a fortement participé à l'évolution de celle-ci au travers de celui du jeu de la vielle (2), mais également parce qu'en l'écoutant c'est toujours toute une époque, celle des ses premiers 33 tours, qui nous revient en mémoire telle la Madeleine bien connue...(3). Bien entendu, plus de trente ans plus tard, son jeu n'a plus la même capacité de nous étonner et nombre de ses trouvailles pourraient presque passer pour des poncifs aujourd'hui. C'est sans compter sur son sens musical et une voie dans laquelle il se maintient, contemporaine sans être conceptuelle, loin des improvisateurs qui fuient la mélodie ou la répétition comme une tare. Au contraire, cette musique malgré quelques petits passages un peu free, c'est une musique qui parait bien davantage construite, façonnée.... C'est donc un album que l'on appréciera davantage au fil des écoutes, lorsque l'esprit accompagne le déroulement des phrases. Après un précédent album solo sur un label breton, le voici en duo sur un label belge avec, à ses côtés, le clarinettiste néerlandais Steven Kamperman qui vient davantage du monde du jazz et joue aussi bien avec Michel Godard qu'en trio avec un contrebassiste et un organiste d'église. Le duo fonctionne bien même si, la clarinette offrant moins de possibilités sonores que la vielle, son jeu pourra paraître moins imaginatif mais il tire parfaitement son épingle du jeu et nous offre quelques belles harmonies, modernes sans être stressantes...
Homerecords : http://www.homerecords.be
(1) et le plus amusant c'est qu'une partie du public trad. ne l'a jamais remarqué ou que l'on en entende certains regretter aujourd'hui qu'il s'en soit éloigné (sic !)
(2) il n'a pas été le seul acteur de cette évolution (Zosso avant lui, Lemeur-Lefevre à la même époque et on pourrait en citer d'autres, sans oublier naturellement les luthiers) mais son rôle a été décisif.
(3) celle de Brel naturellement, d'où la majuscule... On parle de musique ici pas de cuisine.... ;-)
Rappels très très partiels :
... mais en remontant tout de même à son premier album (33t) de vielle en 1984 "La vielle à roue de l'imaginaire" puis celui de 1986 "Esprits de la nuit" avec les Philharmonistes de Chateauroux
Ensuite j'ai du rater pas mal d'épisodes....
jusqu'à son album précédent chez Innacor en 2013
Mais sans rater toutefois sa méthode de vielle avec DVD (Modal 2006) :
Je vous avais entretenu du premieKV Express "Luna" il y a 10 ans déjà et, après un second album trois plus tard (1) il aura donc fallu attendre sept ans pour ce troisième volume car, entre temps Sophie Cavez s'est davantage investie dans d'autre projets. En relisant ce que j'avais écris à propos du premier, je constate que le projet est resté fidèle à lui même : ne vous méprenez pas à la vue des sept noms de musiciens: il ne s'agit pas d'un groupe mais d'une soliste, appuyée au besoin par un percussioniste (Jo Zanders) et invitant divers musiciens de renom à l'accompagner sur l'une ou l'autre plage. L'album se présente donc surtout comme une suite de duos et les fans de Karim Baggili, Grégory Jolivet, Didier François ou Julien Padovani pourront être déçus de ne les entendre que sur un plage chacun (2) et ce d'autant que, jouant le jeu du duo, ils ne font pas étalage de virtuosité personnelle. Le passage du Oud à la vielle en passant par le nickelharpa ou le clavier pourrait produire un album hétéroclite type catalogue, mais le style de Sophie Cavez aussi bien pour le jeu (beau toucher) que pour les compositions, donne à tout cela une belle homogénéïté. Elle assure également des plages en solo ou juste accompagnée par Jo Zanders, mais il s'agit parfois plutôt de duo d'accordéon car si j'ai commencé par trouver qu'elle avait une belle indépendance des mains, j'ai fini par admettre que celle-ci ne devait parfois être permise que par un double enregistrement ; mais le résultat est là....
Je ne sais pas si, en dehors de la "Valse Padeau" ou de la "Polska des Pineau", des noms danses sont mentionnées sur la tracklist (je n'ai pas la pochette) mais le style de Sophie est manifestement forgé par le jeu en bal et comme elle sait préserver malgré tout une certaine sensibilité le résultat est très agréable à écouter.
(1) l'album D-Sensation que je n'avais pas vu passer, de même qu'ensuite ceux du duo Cavez-Montanaro, le quartet d'accordéons Knopf Quartet ou le trio Jeff Caresse. Ce n'est pas par choix que je vous parle de tel album et pas de tel autre : cela dépend simplement des éditeurs ou musiciens qui me les font parvenir ou pas.
(2) La dernière invitée est l'artiste multidisciplinaire contemporaine Fabiola Fernandes que je n'ai pas placée dans la même liste car à priori peu connue dans notre milieu. Son intervention chantée sans paroles n'est pas vraiment ma tasse de thé mais ce n'est qu'une question de goût... Pas facile de trouver des infos sur elle sur le net car elle porte le même nom qu'une marque de maillots de bains brésiliens qui monopolise les résultats des recherches et le site Homerecords nous apprend que " Ses principaux sujets de recherche sont la réincidence non chorégraphiée des modèles d'expression, la composition en temps réel, les accessoires faisant le croisement entre la scénographie avec des interventions éphémères dans l'espace et l'impression expérimentale performative comme un moyen d'enregistrer une performance en direct" ce qui ne nous renseigne guère davantage....
Rappels : Sophie Cavez : voir à partir du premier album
Karim Baggili : voir à partir de "Douar"
Grégory Jolivet : voir à partir de "Alt'o solo"
Didier François : voir à partir de
Troisième album de ce groupe mais comme je n'ai pas eu l'occasion d'écouter les précédents je ne pourrai pas jouer aux sept différences...
Au sein de ce quartet de musique à danser nous retrouvons du beau monde. Julien Cartonnet aux musettes du Centre mais également au banjo, un instrument certes totalement différent mais sur lequel il est tout aussi impressionnant, Tiennet Simonnin à l'accordéon chromatique, certain penseront "naturellement" mais ce serait oublier que s'il se produit essentiellement en public avec ce gros soufflet entre les mains, il pourrait en découdre également avec pas mal de manieurs de sacs et de tuyaux ; ce n'est pas encore le cas ici, dommage... Et si le titre nous indique que le galant est indiscret, Tiennet fait plutôt dans la discrétion en assurant essentiellement l'accompagnement (1), en compagnie de Sylvain Quéré à la guitare, laissant le soin à Sylvain Vuidart à la flûte traversière et à Julien déjà cité, de dérouler les mélodies.
Des mélodies essentiellement composées (par les membres du quartet ou par d'autres musiciens plus ou moins de la même trempe, de divers pays), souvent un peu alambiquées ce qui fera d'autant plus apprécier l'efficace simplicité de la mélodie qui fournit son titre à l'album ou de celle de cette belle version aveyronnaise de Réveillez vous belle endormie, la seule plage de l'album qui n'est pas destinée à la danse. Bien entendu les autres ne sont pas destinées qu'à cela mais on est tout de même bien dans l'esthétique des groupes de bal trad. actuel, par l'ambiance sonore, par certains tempos mais également par le répertoire qui saute sans complexe de la Bretagne à une bourrée apatride, d'un reel devenu scottisch à l'inévitable cercle circassien. Tant qu'à écouter ce style de musique autant le faire avec des musiciens de cette trempe... Des musiciens dont on sait par ailleurs qu'ils sont aussi à l'aise dans un registre bien plus à l'ancienne.
(1) accompagnement à prendre au sens large, de l'harmonico rythmique au contrechant, voire en doublant la mélodie ou en introduisant celle-ci.
Rappels :
Mister Klof : album éponyme en 2011 puis Octopus (2013)
Tiennet Simonnin : au sein du Duo TTC album éponyme en 2010, "Aux objets trouvés" en 2013 et en 2017 : "La valse à Viseur" et avec Les Enfants du Bal, album éponyme en 2015
Analyse du jeu de Victor Alard et de J. Aigueperse en annexe à l'ouvrage d'Agnès Unterberger et al."Victor Alard Musicien ambulant"
Traucanèu "Musique traditionnelle du Massif Central"
Julien Cartonnet : voir à partir de son album solo"Cornemuses du Centre (16 et 20 pouces), banjo, du Nivernais-Morvan"
Sylvain Vuidard : au sein de Kitus "Après l'after..." et "Eh bien, dansez maintenant !"
Duo Quéré / Vuidart : album éponyme
J'étais persuadé de vous avoir chroniqué cet album de longue date (1) et vérification faite je me rends compte que je ne l'avais fait que dans ma tête et que je n'avais pas retranscrit sur le présent site...
Corrigeons donc immédiatement cette situation et cela sera d'autant plus utile aux amateurs de musette baroque que la couverture cite le ténor Stéphane Van Dyck ainsi que Jean Luc Impe qui dirigie l'ensemble Les menus plaisirs du Roy et y tient les parties de théorbe, mais pas les cinq autres musiciens dont Pieterjan Van Kerkhoven dont il s'agit à ma connaissance du premier enregistrement édité à la musette mais dont j'ai déjà eu l'occasion de vous entretenir dans un tout autre registre (2) car il faut également partie du groupe Wör. Donc mis à part l'image, rien ne vous indique à la vue de la face avant de la pochette qu'on y entend de la musette.
Voici donc un album ou la musette est bien présente, parfaitement mise en avant sur quelques pièces au même titre que le chant ou le traverso, sur un accompagnement de viole, clavecin, théorbe et percussions sur d'autres. Le programme est donc varié et peut constituer une excellente introduction à l'instrument, d'une part en le replaçant bien dans son cadre et d'autre part, pour le grand public, en évitant l'indigestion de bourdons qui peut résulter de l'écoute d'un album uniquement centré sur la musette. Cela dit il ravira aussi les officionados... On regrettera juste que nulle légende ne donne la référence du tableau utilisé pour la pochette, je précise donc qu'il s'agit de la Pastorale d'été de François Boucher, à priori celle conservée à la Wallace Collection de Londres.
Pieterjan fait partie de la nouvelle génération des joueurs de musette, ceux qui ont la chance d'avoir pu bénéficier dès le départ de l'expérience de leur prédécesseurs, en l'occurence Jean-Pierre Van Hees, qui lui même avait pu bénéficier du défrichage effectué par le regretté Jean-Christophe Maillard (3). C'est d'ailleurs ce dernier qui avait rédigé le texte du livret, quatre belles pages dans lesquelles il présente J. Bodin de Boismortier, compositeur dont la réputation fut entachée par une production prolixe et un usage pédagogique de celle-ci mais qui mérite d'être redécouvert en tant que compositeur à part entière. Il analyse également les pièces avec une compétence que je ne prétenderai jamais avoir et je vous renvoie donc volontiers à ce texte dans lequel il va jusqu'à justifier les adaptations d'instrumentation faites pour cet enregistrement. Mais si je vous rappelais que Pieterjan est un élève de J.P. Van Hees c'est surtout pour expliquer qu'il fait partie de cette génération dont les meilleurs éléments maîtrisent leur instrument avec une aisance et un naturel qui leur assure une marge de liberté au service de l'expression. Et comme à son âge il dispose encore probablement d'une marge de progression, cela nous assure d'autres beaux enregistrements à venir.
http://musica-ficta.com
(1) l'album date de 2015 mais je ne le connais que depuis ma rencontre avec le très sympathique Pieterjan en mai 2016 en Galice.
(2) pas tout à fait différent d'ailleurs puisque Wör joue certes dans un style actuel mais du répertoire de manuscrits du XVIIIème tout de même.
(3) sans oublier naturellement les facteurs sans lesquels rien n'aurait été possible et en premier lieu Rémy Dubois.
Pieterjan Van Kerkhoven :
- en duo avec Jean-Pierre Van Hees "Nicolas Chédeville - Les impromptus de Fontainebleau - pièces en deux parties pour les musettes"
- au sein du groupe Wör "Back to the 1780's"
Joseph Bodin de Boismortier : voir à partir de Joseph Bodin de Boismortier - "Ballets de village et Sérénade." (ou plutôt de la suivante juste en dessous)
Décidemment, 2016 aura été, discographiquement, une année de la bodega, avec trois productions consacrées à l'instrument et dont les protagonistes, font d'ailleurs parfois la promotion ensemble plutôt que de se placer en concurrence. D'ailleurs, à entendre les deux que j'ai écoutés, ils se complètent, chacun abordant l'instrument par une approche propre. Pour Sofia Jacques de Dixmude, récemment devenur Sofia Jacques Serano, infatigable militante de l'instrument, cette cornemuse occitane est d'abord un catalyseur de rencontres et de la fête, bien plus que l'instrument que l'on travaillerait inlassablement chez soi pour parvenir à une interprétation sans faille. Elle a d'ailleurs fait le choix d'enregistrements en situation plutôt qu'en studio et nous invite, sur ce double CD, à rencontrer tous les amis musiciens avec lesquels elle partage des moments de musique : ses propres groupes, naturellement, mais aussi d'autres musiciens ou chanteurs occitans renommés, un compatriote belge également installé dans le sud et puis, encore au delà, des musiciens italiens ou galiciens (comment ne pas sympathiser avec Xistra de Coruxo lorsqu'on a eu la chance de croiser leur chemin ?). Elle s'offre également le petit plaisir de jouer sur des collectages de Louis Mas, l'un des derniers témoins (malheureusement non bodegaire lui-même) de la pratique traditionnelle de l'instrument, décédé dans les années 80.
Aujourd'hui certains savent faire sonner l'instrument aussi "juste" qu'un piano, ce n'est pas la direction qu'a choisie Sofia, d'ailleurs essayez de faire un boeuf trad ou un carnaval avec un piano...
jacquessophie41suivi de @gmail.com
J'ai pris l'habitude de vous chroniquer, dans ces infos consacrées en principe aux musiques traditionnelles, les productions du label belge Homerecords même si leur lien avec ces musiques trad. est parfois léger, voire inexistant. Ceci d'une part parce que j'estime qu'il est important de soutenir ces petits labels indépendants qui font un travail excellent et irremplaçable en faveur de musiques originales et de qualité et, d'autre part parce qu'il s'agit généralement de musiques acoustiques, relativement mélodiques et donc susceptibles d'accrocher l'oreille de l'amateur de musiques trad (1). Mais je serai très bref avec des deux albums, car mis à part quelques parties de duduk ou d'oud, l'album de Melike Tarhan au sonorités moins natures et moins originales que d'habitude me fait plus penser à de la variété internationale (voix un peu éthérée et révérbérée, batterie qui ne fait pas vraiment dans la dentelle, rifs électriques…). Quant au trio de Seahorse, il relève d'un jazz acoustique (guitare, saxo et batterie cette fois-ci beaucoup plus délicate, très jazz, tenue par Fred Malempré) de bonne facture, relativement mélodique, avec une belle écoute entre musiciens mais qui entre complètement dans cette catégorie jazz et qui sera donc chroniqué par des personnes bien plus compétentes de ce circuit.
(1) il y a une troisième raison c'est qu'il me font parvenir ces enregistrements et que du coup j'ai du mal à feindre de les ignorer…
Rappel : Melike Tarhan : voir à partir de l'album Melike "Inn of love"
Fred Malempré : voir à partir de Tref : "Loop of the Moon"
Oscar Ibanez est un gaitero galicien encore peu connu en France (il a du se produire à Lorient tout de même...) mais qu'il faut tout de même considérer comme une des pointures actuelles de l'instrument, quasi au même titre que Suzana Seivane ou Carlos Nunez pour ne citer que les deux vraiment connus par chez nous. Il partage d'ailleurs un look capillaire proche de ce dernier et un égo également fort dimensionné qui devrait lui permettre également de mener sa carrière. Mais à l'écoute de cet album je constate que sa musique demeure bien plus galicienne et moins irlandisée : on notera bien un texte de pochette qui réfère aux celtes, l'usage de quelques ornements plutôt écossais (2) mais placés assez discrètement et une suite de muineras dont le début pourrait rappeler certains arrangement des Chieftains et la fin clairement le final d'un show type Lord of the dance. Mais pour le reste, bien davantage dans la lignée de S Seivane, il nous offre un album bien galicien (1), autant dans ces pulsations qui en font toute la saveur que dans le répertoire et dans l'instrumentation, notamment du côté des percussions. Si l'album est celui d'un gaitero, il a su bien s'entourer (la liste des musiciens pourrait d'ailleurs figurer au dos de la pochette) et le son est celui d'un groupe galicien actuel avec accordéon, violon, guitare, bouzouki, percussions traditionnelle naturellement, voire basse électrique. Et saluons le mixage qui place la gaita juste ce qu'il faut au premier plan. Un bel album qui vous met de bonne humeur, même s'il finit par une lente et ample Morrina, avec une gaita soliste juste soutenue par un accordéon joué comme un harmonium et qui finit avec une belle maîtrise dans le registre aigü.
Un musicien à suivre donc, en espérant qu'il résiste aux sirènes du pan-celtisme musical et qu'il continue ainsi à nous faire partager la tradition galicienne ... et pourquoi pas sur les scènes de nos festivals et pas seulement du FIL ?
http://www.oscaribanez.com
(1) pour être exact signalons également la présence d'un Arin-arin, naturellement basque mais qui s'inscrit parfaitement dans le déroulement de l'album.
(2) mais signalons à contrario qu'originaire de Pontevedra, Oscar Ibanez à oeuvré autour du doigté fermé ou semi-fermé qui se pratiquait dans cette région et dont Ricardo Portela fût le témoin le plus connu.
Rappel : c'est en consultant son site que j'ai pu découvrir que j'avais déjà chroniqué un de ses albums ou plutôt l'album d'un sympathique groupe dont il fut le fondateur : Paidacana et son CD "12"
Idée, production artistique et participation à l'album "Piperegrinos - As gaitas do Camino"
Voici un titre d'album qui pourrait bien vous induire en erreur car il ne s'agit nullement d'un album de tango et il vous faudra attendre la 6ème plage si j'ai bien compté pour trouver une cadence musicale qui sonne réellement tango, après, entre autres, une première mélodie asymétrique aux couleurs davantage balkaniques qu'argentine. D'accord la fin de la seconde plage, celle qui donne son titre trompeur à l'album; finit effectivement sur une ambiance à la Piazzola mais toute sa première partie est une superbe mélodie lentement déroulée sur une pulsion de respiration tout à fait captivante. Et la troisième est clairement une mazurka telles qu'elles se jouent en ce moment, la quatrième un belle valse asymétrique alternant avec des passages en valse lente etc.
Jonathan De Neck nous offre donc ici un album de diato actuel, avec un beau toucher, judicieusement accompagné par une percussionniste flûtiste à ses heures et, surtout par un violoncelliste, un violoniste (également contrebassisite) et un contrebassiste (également guitariste), et c'est peut-être dans les couleurs de cet accompagnement de cordes, dans ces arrangements soignés que l'on peut rechercher un rapport avec le tango... ou bien, plus simplement, oublier tout bonnement ce mot du titre et juste profiter de ce bel écrin offert au diato de Jonathan, un musicien pas vraiment connu en France mais qui a pourtant participé à nombre d'aventures musicales en Belgique parmi lesquelles je ne citerai que Laïs, Ialma (voir photos ici), Dazibao avec Sophie Cavez…
Diab quintet : précédent album Fourmillières (même éditeur et mêmes musiciens)
Jonthan de Neck : Dazibao : " Alma "
, " E40 "
Tali Toké "Tali Toké"
Rui Salgado : Marteen Decombel " October Sunrise "
Lara Léliane " Free "
Je vais essayer d'être objectif pour vous présenter ce CD enregistré par deux amis : Thierry Legros tout d'abord avec lequel je tiens tous les ans le stand du Grenier des collègues sonneurs au Son Continu et également André Deru que l'on peut y voir également chaque année dans un stand de facteur d'épinettes… Il est donc question principalement d'épinettes sur cet album et si cet instrument phare du revival des années 70 souffre toujours du contrecoup de cette popularité et du fait qu'il servit de premier instrument à pas mal d'entre nous, cela fait du bien de le réentendre lorsqu'il est ainsi sous de bonnes mains qui nous rappellent que son jeu peut être bien plus fin que ce que nous en faisions à l'époque… C'est tout d'abord un certaine forme de swing tranquille qui se dégage de cet enregistrement : le jeu du duo dégage tout à la fois une certaine quiétude, mais avec ce qu'il faut de petites suspensions bien placées pour créer une musicalité très agréable. C'est ensuite la complicité de deux musiciens habitués à jouer ensemble depuis des années qui est remarquable : il est des plages où lorsque des harmonies apparaissent, on se pose réellement la question de savoir si la seconde épinette vient seulement d'entrer en jeu ou bien si l'unisson était quasi parfait auparavant, y compris dans ces petites suspensions évoquées ci-dessus… On revient en arrière et on constate qu'effectivement il y avait bien deux épinettes (la stéréo permet d'entendre qui fait quoi), que l'unisson n'était pas si parfait mais que l'ensemble dégage une unité qui ne nous avait fait percevoir qu'un instrument.
Pour varier les ambiances, Thierry manie également l'archet, tout d'abord sur une petite vielle à archet qui lui tient à cœur puisqu'il avait fait faire par Louis Georgel. Il en use dans un style assez rustique en appuyant bien sur l'archet, ce qui surprend un peu à la première écoute mais auquel on se fait rapidement. Il joue également d'une nickelharpa dans un style bien plus aérien, cordes sympathiques aidant… Le répertoire est essentiellement traditionnel wallon (manuscrits jusqu'au XVIIIème ou collectages) avec tout de même une compo de chacun des deux musiciens et une d'un autre épinettiste connu en Belgique mais peu en France : Lucien Delvecchio. Parmi les traditionnels wallons, notons la présence de la mélodie de la bourrée " Mon père arrachait les raves " (1) avec une jolie seconde partie.
"Tous simplement !" : le titre de l'album résume bien la philosophie musicale du duo, rajoutons "mais efficacement..."
(1) ou encore " J'em… la moitié du monde " pour les morvandiaux
Autoproduction : http://salonambroisine.be
Un nouveau volume dans cette collection nordiste dédiée aux instruments et, après la flûte traversière en bois, restons fidèle à l'ébène avec cet opus dédié à la clarinette ou plutôt aux clarinettes puisque trois tonalités sont utilisées, souvent conjointement par Claire Genet. Claire est bien connue dans le Nord et au delà comme étant la fille de Polo et Fanette mais, par delà cette ascendance, parce que cela lui a donné l'occasion de presque naître une clarinette entre les doigts et cela fait beau temps qu'on a l'occasion de l'entendre, notamment au sein du groupe Les Pantouflards et même auparavant sur certains enregistrements de la Piposa. Il était donc naturel que Dominique Bommel (1) lui propose la réalisation de cet album, même si son jeu n'est pas aussi spectaculaire que peuvent l'être celui d'autres clarinettistes du petit monde du trad. Ici pas de pince d'anche rustique à la façon des treujeun gaol, pas non plus de glissendos à la klezmer ce qui ne déplaira pas à certains (j'en connais) qui ne supportent pas ce côté parfois un peu caricatural de l'instrument, pas non plus de slap sur l'anche de la clarinette basse. Claire a un jeu plus classique et, d'ailleurs, la dernière pièce de cet enregistrement, l'une de mes préférées, interprétée à trois clarinettes, pourrait fort bien figurer au répertoire des ensembles de clarinettes de conservatoires ou école de musique (2).
Précisons de suite que la plupart du répertoire interprété ici a été composé par Claire et que l'on n'est donc pas dans un album dédié à un instrument et à un répertoire traditionnel mais plutôt dans celui d'une musicienne qui s'exprime sur son instrument. Ajoutons qu'aucune mention de danse ne figure sur la pochette, même si certaines plages doivent bien avoir été déjà jouées en bal. Seul le traditionnel suédois trahit par son titre son caractère de polska. Quant à la seconde plage qui n'est pas composée par Claire elle fait se succéder une composition de Gérard Delord et une de Georges Cantournet sur laquelle Polo vient prêter main forte à la cabrette avec un joli son mais un swing encore perfectible. Parmi les autres invités, outre les Pantouflards sur une plage, je soulignerai la présence d'Albin Suffy à la basse électrique sur trois plages, avec un jeu dynamique et nerveux bien mis en valeur par une prise de son qui permet de ressentir l'attaque et la vibration des cordes. Un musicien auquel le label pourra confier un futur opus dédié à cet instrument, bien loin de ces insupportables basses qui ne produisent que d'insipides nappes harmoniques.
(1) cheville ouvrière du label Bémol productions.
(2) Je lis toujours les textes de pochette après écoute et j'y apprend qu'effectivement, Claire a été à la double école de la musique trad. et école de musique plus académique…
Bemol production : http://www.bemolvpc.com
Rappel : Voir à partir de l'album des Pantouflards "Black Savate"
J'ai découvert ce groupe géorgien l'an passé lors du festival de cornemuses de Balingen (voir photos) où, même si son usage des cornemuses demeure plutôt anecdotique, il était l'invité principal, donnant plusieurs concerts avant et après le week-end principal des rencontres. J'ai pu acquérir (1) ce CD à l'issue du premier concert du samedi et c'était la dernière galette disponible alors qu'ils avaient apporté plusieurs exemplaire de chacun de leurs enregistrements, une collection qui sous des pochettes semblables mais de couleurs différentes, met à chaque fois l'accent sur un aspect particulier de leur tradition (le chant, les cordes ou ici les duduks), ce qui n'empêche nullement les autres instruments et la voix d'être présents. Il faut dire que ces musiciens sont de ceux qui passent d'un instrument à l'autre et se mettent à chanter avec toujours la même perfection et, surtout, le style propre qui vous fait reconnaître dès les premières notes qu'il s'agit bien d'artistes géorgiens. Sans oublier une indispensable pincée d'humour avec ce tango interprété au duduk…
(1) En principe je ne chronique pas les CDs que j'achète mais je fais parfois des exceptions…
http://www.urmuli.ge
J'ai fait la connaissance de Maxence il y a quelques années sur le stand du grenier des collègues sonneurs au Chateau d'Ars, à l'époque où il n'avait d'ailleurs pas encore cette dénomination. Un personnage sympathique et visiblement curieux, entre autres, de tout ce qui tourne autour des instruments à vent. Au fil des ans j'ai compris qu'il jouait de diverses cornemuses, puis qu'il était capable de les régler même des modèles étranger. Et comme beaucoup cette année, j'ai pu apprécier son caractère plus que facétieux à l'occasion du concours et de son passage sur la grande scène qui suivit... Certains ont d'ailleurs été surpris qu'il ait pu remporter ce concours en considérant sa prestation strictement musicale hors mise en scène et, le standard en question figurant sur l'album, il faut bien avouer que ce n'est pas la meilleure plage et que privée de ses claquement de main qui en font une grande partie de l'intérêt, ce n'était probablement pas le morceau qui mettait le plus en valeur ses compétences de crabaïre, chanteur et pluri-instrumentiste... Si vous étiez parmi ceux qui partageaient ce point de vue, je vous conseille donc fortement l'écoute de cet album qui, si la bodega y est quasi-omniprésente, ne doit pas pour autant être considéré comme un spécial instrumental bodega car il renferme bien d'autres choses et notamment grâce à la présence de complices tel Daniel Dettemmaecker qui parvient si bien à marier le son de son harmonica à celui de la craba ou sa voix à celle de Maxence, Caroline Dufau au chant et tous trois à tout un capharnaum d'appeaux, instruments divers et objets qui ne demandaient qu'à le devenir. Et saluons la présence de Xavier Vidal au chant sur une plage et pour un duo de bodegas avec Maxence sur une autre. Saluons également la reprise par Maxence d'un traditionnel collecté par Charles Alexandre et joué par ce dernier sur un 33 tours qui, pour beaucoup d'entre nous, a constitué la première audition de l'instrument et reste donc le morceau lié à l'instrument. On mesure d'ailleurs à l'écoute le chemin parcouru entre les deux enregistrements...
Un mot indispensable enfin pour la remarquable prise de son qui permet de détailler tous les ornements de Maxence et pour le mixage qui réussit à équilibrer un duo aussi improbable qu'harmonica et bodega.
AEPEM : http://www.aepem.com
Rappel : Daniel Dettemmaecker, voir à partir de l'album du duo Lamzé
Si je vous répète quasi à chaque chronique que les albums produits par Homerecords sont inclassables (et c'est une des raisons parmi d'autres qui les rend d'autant plus intéressants…) celui-ci se rattacherait plutôt plus ou moins à trois étiquettes différentes selon les plages : il débute et finit avec des couleurs résolument africaines : appel façon djembé, polyphonies qui me font penser à celles d'Afrique du sud… mais avec des sonorités occidentalisées (1). Il y a également un beau solo de djembé au milieu de l'album. Deux plages chantées en français se raccrochent davantage à un certain style de chanson française actuelle et je dois avouer que ce sont celles qui me touchent le moins. Et tout le reste qui constitue la matière principale de l'album est dans le registre blues, avec la voix de Désiré Ntemere qui a ce qu'il faut de grain et des intonations dont la sincérité vous touche même sans comprendre les textes, cela sur fond d'harmonica (2), de piano et de percussions (entre batterie et percus africaines) qui savent ne pas envahir l'espace. Je ne ferai pas semblant de m'y connaître en blues, mais celui-ci s'écoute résolument bien… Vous l'aurez compris, cet album essaye de refaire le pont entre le blues et ses racines africaines, avec quelques influences belges (le chanteur est du Burundi, le percussioniste Kankan Bayo doit être mandingue et les deux autres musiciens belges). Je ne sais pas si le pont est vraiment établi mais en tout cas les piliers sont solides.
(1) bon d'accord, l'Afrique n'est pas plus à l'orient que l'Europe….
(2) harmonica joué par une femme mordue et pro de l'instrument ,ce qui n'est pas courant : Geneviève Dartefeuille qui manie également le didjeridoo sur cet album. Le piano est aux mains de Renaud Patigny qui manie également le balafon.
Voici un album que j'ai, comme souvent, écouté à l'aveugle et qui m'a laissé dubitatif par son côté original et inclassable (mais ça c'est normal chez Homerecords) et multifacettes, passant d'ambiance rock à d'autres que je situerais davantage dans la comédie musicale anglo-américaine un peu jazzy, des choeurs parfois un peu plus contemporains dans leurs harmonies.... Puis en revenant au livret je me suis souvenu qu'en le recevant j'avais brièvement aperçu (je l'ai reçu en mp3 sans même un livret en pdf) qu'il était inspiré par les univers graphiques du dessinateur belge François Schuiten et de ses architectures imaginaires et oniriques et tout cela s'explique donc à la lumière de ce concept un peu fou... Il faut donc que je mettes la main sur une de ses BD pour réécouter l'œuvre musicale face à sa muse graphique…
Précisons que les principaux instigateurs de ce projet sont cinq des musiciens de "A consommer de préférence" dont je vous ai déjà entretenu de deux albums et qu'ils sont secondés ici par chanteurs et choristes, un guitariste "de la famille" et l'OSEL dont j'ai fini par trouver sur le net qu'il s'agit de L'Orchestre symphonique des étudiants de Louvain (il me semblait bien avoir entendu des parties de violoncelle...).
Rappels : voir à partir de A consommer de préférence "Elevé en plein air"
Le label Homerecords couvre un domaine des musiques acoustiques bien plus vaste que les musiques traditionnelles mais il vient récemment de publier plusieurs albums davantage dans le registre de mes infosmumuses que les deux précédents : Valentin Clastrier (qui n'a jamais fait de musique trad à proprement parler mais dont l'instrument nous est cher et qui a toujours su captiver le monde du trad. depuis ses débuts à la vielle), les chanteuses galiciennes de Ialma, Geneviève Laloy (là on doit être plus dans la chanson mais la famille est bien connue) Sitardust, un album qui mêle sitar et violoncelle notamment ou enfin un autre qui mêle ce dernier instrument au son du qanûn irakien... Je n'ai pas encore eu l'occasion d'écouter tout cela
Bémol nous offre une nouvelle perle de sa collection dédiée aux instruments (1) en mettant en avant un instrument somme toute discret tant physiquement (un grand tube noir qui n'arbore pas le clétage tape à l'oeil de certain de ses confrères, ne s'élargit même pas en pavillon et n'a pas eu l'idée de s'adjoindre une poche pour se donner du volume) que du point de vue sonore (faute de la puissance d'une anche, il ne compense pas par un registre aigu comme ses sous-fifres) et même du point de vue de son image dans notre milieu puisque, bien qu'ayant une longue histoire, il n'est entré que relativement récemment dans quelques musiques traditionnelles où il a trouvé une petite place aujourd'hui, c'est à dire principalement l'irlandaise puis, par contagion récente, la bretonne. On s'étonne d'ailleurs qu'il n'ait pas trouvé sa place dans d'autres revivals (2) … simple question de tonalité peut-être. Il ne bénéficie pas d'appellations régionales et, bien que plus ancien que la flûte traversière métallique type Boehm, afin de se différencier de cette fille qui a pris toute la lumière, il est obligé de préciser son matériau dans son nom, de spécifier qu'il est en bois comme s'il s'agissait d'une caractéristique rare au risque de faire pâlir n'importe quel tourneur (3).
Ceci étant posé Anne Girard Esposito qui maîtrise parfaitement cette " flûte traversière en bois " ne déroge guère à la règle géographique susmentionnée en commençant cet album en Bretagne et en finissant de même, l'essentiel des autres plages se déroulant en Irlande (voire Ecosse), avec juste une exception polonaise, une des plus belles plages de l'album qui donne envie de voir cette flûte s'échapper davantage vers d'autres traditions. S'il comporte naturellement quelques plages en pur solo, Anne a su s'entourer de quelques bons accompagnateurs (si je vous cite Julien Biget ou Janick Martin il ne sera pas besoin de développer davantage, mais je citerai également Guillaume Vargoz au bodhran pour son rôle aussi discret, efficace et indispensable sur Girls, will you take him ? et trois danseurs sur la première plage histoire d'avoir la bonne cadence). Quoiqu'il en soit et même si l'une ou l'autre plage du début est un peu plus chargée (Anne doit d'ailleurs avoir un peu fait de rerecording puisque l'on entend parfois deux flûtes, ou sa kalimba derrière la flûte), l'instrument est toujours maintenu au premier plan ce qui justifie pleinement l'inscription de cet enregistrement dans cette collection.
(1) Après les " Spécial instrumental " du chant du Monde, " L'Art de " chez Arion et la non moins fameuse collection " Cinq planètes " de P. Krumm, le concept n'est pas nouveau, mais toujours aussi indispensable, merci à D. Bommel d'avoir ainsi pris le relais…
(3) A la fin de l'article en deux parties qu'Anne Girard Esposito a consacré à l'instrument dans les numéros 131 et 132 de Trad. Magazine (en 2010), elle indiquait que les Asturies (Espagne) ont connu une tradition de jeu de la flûte traversière en bois et que celle-ci connait un revival. Ailleurs, et en dehors des musiciens de tous pays qui pratiquent la musique irlandaise, l'usage de l'instrument sur des répertoires locaux demeurait le fait de musiciens encore isolés : Eric Elsener en Bourbonnais, Emma Johansson en Suède ou Michal Zak en Pologne notamment. Elle m'a informé que la situation a évolué depuis et que la pratique s'est développée en Suède (voir par exemple Andreas Ralsgård and Markus Tullberg). Attention, nous parlons bien ici de la grande flûte traversière en bois et non des fifres dont l'histoire et le revivals sont bien différents !
(3) pourquoi pas flûte traversière en bois et à vent tant qu'on y est pour la différencier des flûtes midi ? Mais il est vrai que celle-ci sont le plus souvent en plastique…
Rappel : Julien Biget : voir à partir de la chronique de La Bergère "Etreintes"
Oubliez l'image sonore que vous avez en tête lorsque vous entendez parler de chants de marins, cette expression qui recouvre parfois du meilleur mais trop souvent du bien moins bon. D'ailleurs, sans doute pour se démarquer, les musiciens de La Bricole ont sous-titré "chants maritimes" et non pas "chants de marins" et le contenu de l'album se démarque également largement de ce que l'on peut entendre d'habitude : pas question ici de brailler les standard habituel : le répertoire est original, puisé aux fameux collectages boulonnais de Michel Lefèvre dont M. Denain nous rappelle dans le livret qu'il eut l'intelligence de ne pas écouter ceux qui, dans les années 80, affirmaient qu'il n'y avait plus rien à collecter en la matière. Le livret, fort détaillé (édition AEPEM...) nous détaille d'ailleurs avec la plus grande rigueur, les autres versions connues, les éventuels montages de textes entre celles-ci, les choix de mélodies et autres adaptations réalisés soit par M. Lefèvre déjà, soit par les musiciens de La Bricole afin de nous offrir ces chansons de manière aussi poignante.
J'ai écouté l'album une première fois en voiture, puis à nouveau, plus de trois semaines plus tard après mes vacances et j'ai eu la surprise de constater que j'avais gardé un souvenir précis de chaque plage à la suite de cette seule première écoute, preuve s'il en est que cet album ne vous lâche pas, contrairement à certains autres que l'on met sur la platine et que l'on oublie dès la troisième plage (voire avant...). Il faut dire qu'outre l'originalité du répertoire, des thèmes abordés (citons une chanson de menterie), de l'angle d'attaque de ceux-ci (si plusieurs décrivent par exemple la vie difficile des matelots, ils le font chacun à leur manière et certains de manière inattendue...), l'interprétation de nos trois comparses est d'une efficacité remarquable avec en premier lieu la voix de Vincent Brusel, plus connu dans le Nord et ailleurs comme auteur-compositeur-interprète mais qui joue également de la musique irlandaise. Il en joue déjà avec l'accordéoniste Olivier Catteau, second musicien du trio dont le jeu se situe à mi chemin entre diato et chromatique (sur l'une ou l'autre plage il m'a fait penser au regretté Eddie Schaff. Il officie également à la clarinette). le troisème larron est Julien Biget au bouzuki et à la guitare, un musicien dont il n'est plus besoin de rappeler le talent d'accompagnateur (La Bergère par exemple) et dont les cordes pincées sont parfois rejointes par celles de Vincent.
Le répertoire tire ses sources de différentes époques plus ou moins anciennes et ,l'album débutant par une chanson sur le timbre des "Costauds de la Lune", cette mélodie relativement récente semble donner le ton à l'ensemble : plus proche du musette que d'un collectage trad. mais aussi actuel sans l'once d'un instrument prétendument moderne. Intemporel et indémodable quoi...
AEPEM : http://www.aepem.com Voir photos au Son Continu 2016
Leur album suivant en 2020 : "Jour de Malheur"
Vincent Brusel a publié des albums qui sont davantage dans le registre de la chanson francophone : "Les amuseurs d'oiseaux" en 2012 (avec Margaux Liénard au violon, alto et mandoline et William Schotte au violoncelle)
"Danses sur le feu" en 2014 (tous deux chez Bémol production)
Au lendemain de leur concert-bal avec Ciac Boum au Son Continu 2016 (auquel je n'ai malheureusement pas pu assister), d'aucuns dissertaient sur l'évolution de ce groupe qui était, à les entendre, "bien dommage même si elle était prévisible depuis le début". Je leur laisse la responsabilité de leurs propos mais lorsque j'écoute ce nouvel opus, je constate, au contraire, qu'ils sont toujours dans la même démarche dans leur traitement des mélodies et chansons traditionnelles et toujours avec le même son (qui n'est pas forcément celui de leurs prestations en public comme j'avais pu le constater lors d'un passage précédent à Ars : un sonorisateur n 'est pas un ingénieur du son de studio, n'a pas les mêmes objectifs et favorise généralement le gros son, c'est à dire les basses et la rythmique.)
Ils sont d'ailleurs tellement dans la continuité qu'à la première écoute, sur certaines mélodies déjà connues, j'ai eu l'impression de les avoir déjà entendues dans leur interprétation. Même le changement de percussioniste (Florian Huygebaert vient remplacer Marc Riou, même si celui vient encore prêter main forte sur trois plages) s'est fait en préservant la sonorité bien particulière de leur set de percussion et notamment les congas. Tout juste pourra-t-on remarquer que Julien utilise davantage le violon. Gregory Jolivet assure toujours le rôle central, actif tant sur la mélodie, l'harmonie et la rythmique, tout cela sur sa vielle et avec ce son si particulier et ses coups de poignet rapides et précis. Julien n'a plus qu'à s'appuyer dessus pour poser sa voix ou ses lignes de violon ou cornemuse. Puis, outre Florian déjà cité, Jean Laurent Cayzac, le plus musicalement discret de la bande à l'écoute (peut-être parce qu'il se fond dans le son de la vielle et des percus), assoit l'harmonie sur sa contrebasse (avec naturellement la cadence unique qu'assure cet instrument et que la basse électrique, qu'il emploie également, ne saurait égaler...).
On pourra leur reprocher de ne pas évoluer davantage, mais lorsque l'on a ainsi une personnalité musicale unique, ce serait au risque de se fondre dans la masse et de donner raison aux détracteurs cités en tête de la chronique...
Rappels : voir à partir de la chronique de leur premier album : " Les rôdeurs "
Les bohaires sont très productifs en ce moment, voir par exemple le receuil des relevés de bohas anciennes ou l'album d'Adrien Villeneuve, mais c'est d'un album dont la sortie risque d'être plus discrète (autoproduction) dont dont je vais vous entretenir. A la vue de la pochette on ne sait pas trop bien si "Les sonneurs de Saint-Lon" sont le nom du groupe ou le titre de l'album, c'est la seconde option qui est la bonne, et plus exactement il s'agit du titre de ce conte réaliste, en forme de carnet de voyage qui nous ramène quelques décennies à peine en arrière et dont on se demande tout du long quelle est sa part de vécu et la part d'invention. Mais il s'agit également du nom du groupe de musique présent dans l'histoire et musicalement interprété par le groupe Vira e Boha, un quatuor très familial puisqu'il rassemble Ghislaine et Jean-Paul Saintorens, bien connus pour leur association avec Yan Cozian dans la facture de bohas et, d'autre part Didier et Rose-Marie Deblonde, tous deux enseignants en musique traditionnelle (vielle et boha). Autant dire que les instruments sont parfaitement réglés et que leur jeu est précis, avec une écoute réciproque qui transparaît à l'écoute et même lorsqu'ils sont à l'unisson, une ambiance de polyphonie ( la vielle assure souvent une voie de basse très agréable et qui suffit à donner du relief à l'ensemble). Bertrand Jarrigeon, comédien et auteur, nous narre l'histoire de sa belle voix grave et son ton très posé (un poil trop parfois...), une histoire qui ne se déroule d'ailleurs pas en Gascogne comme on pourrait s'y attendre mais je ne vais pas vous la dévoiler... Une fois que vous la connaîtrez par coeur, rien ne vous empêche de sélectionner uniquement les 13 plages musicales sur un lecteur mp3 ou autre, d'ailleurs le livret vous donne même les numéros des plages récitées et celles musicales. Un seul trad. parmi celles-ci : un grand classique irlandais histoire de montrer, entre une compo hungaresque et une autre "Woodstock", que les bohas savent s'échapper du répertoire gascon... L'enregistrement étant réalisé en studio, on pourra déplorer un certain décalage lorsque les plages musicales illustrent des soirées d'animation de villages bien arrosées mais nos bohaires ont tout de même une belle cadence...
Un album qui pourra donc servir de carte de visite au groupe (c'est une évidence...) mais aussi aux deux facteurs de celui-ci, un album pédagogique également pour faire connaître l'instrument et puis, tout simplement, un album à écouter pour le plaisir...
Autoproduction : http://vira-e-boha.fr
Rappel :
Bohas Orchestra "Cornemuses landaises - couleurs gasconnes"
Le violonneux Philippe Ancelin avait déjà enregistré en duo avec une chabrette, puis en duo avec un autre violon, comme pour se recentrer sur l'instrument ou plutôt sur une tradition de violon puisque l'instrument a de multiples facettes, même au sein du trad. Il poursuit cette démarche aujourd'hui avec cet album solo qui me paraît constituer un aboutissement, non seulement personnel mais également dans une démarche de réappropriation au plus près d'une tradition passée. Cet enregistrement est presque le collectage idéal, celui que tout collecteur aurait rêvé de faire en rencontrant un détenteur de la tradition en pleine possession de ses moyens (ce qui n'est souvent pas le cas des anciens, rencontrés toujours trop tard), d'un niveau technique lui permettant de gérer toutes les subtilités (ornements, hauteurs particulières...) de ce style et, naturellement, avec la cadence et la sensibilité musicale ad hoc (1).
Ici aucune concession à la modernité, ne serait-ce que celle du jeu en duo (mise à part , à titre d'entracte une plage avec sa fille à l'alto), mais un jeu pur jus, histoire de prover que cette tradition est d'une richesse suffisante pour ne nécessiter nul artifice. Certains cabrettaires poursuivent certes la même démarche, mais sur une tradition déjà plus codifiée à l'époque de son apogée, d'autres violonneux ont déjà creusé le jeu de violon corrézien, mais cet enregistrement me semble le premier à poursuivre cette démarche avec un tel respect. Je n'écris volontairement pas "avec une telle rigueur" car l'album n'est pas vraiment aussi grand public que ceux de formations plus conséquentes, et s'il nécessite un minimum de connaissance des traditions populaires ou, simplement, d'ouverture d'esprit, il n'a rien de rébarbatif ou de monotone.
On regrettera juste l'absence de livret, mais l'origine des morceaux (violonneux source) figure tout de même dans la liste des morceaux au dos de la pochette.
(1) même la prise de son un peu distante fait penser aux collectages autour de la table de cuisine...
Autoproduction : ph.ancelin suivi de @gmail.com
Duo Ancelin-Rouzier…"Tornarem Dançar"
Duo Philippe Ancelin - Fey "Violons d'Auvergne et du Limousin"
Difficile en écoutant cet album de s'imaginer que ce sont ces deux jeunes filles discrètes et relativement statiques sur scène, récemment photographiées au Son Continu, qui dégagent une telle énergie sur cet enregistrement : à les entendre on imaginerait bien plus facilement des musiciens démonstratifs ne tenant pas sur leurs chaises... Ce n'est toutefois pas complètement une surprise car si c'est à ma connaissance le premier enregistrement à leurs noms, Alexandra Lacouchie et Anne Rivaud ne sont plus des inconnues et ce de longue date déjà : Alexandra joue depuis longtemps aux côtés de Philippe Randonneix et Anne Rivaud, de son côté, était l'une des trois protagonistes du jeune groupe creusois Cap23 qui eu son heure de gloire au début des années 2000. Elles étaient donc bien placées pour inviter quelques soutiens pour ce premier album de leur duo, mais nul besoin : elles assurent d'un bout à l'autre seules, sans provoquer la moindre lassitude chez l'auditeur et cet album prouve à nouveau, après un certain nombre d'autres sortis ces dernières années, que la tradition actuelle des violons du Massif Central n'a rien à envier aux autres traditions de violon plus connues dans le monde. Je parle surtout du violon car leur musique puisent essentiellement à ce répertoire (uniquement des traditionnels collectés en Haute-Vienne, Creuse et Corrèze et un morceau plus exotique puisque collecté dans le Puy de Dôme...), sans doute également parce que j'ai l'impression que c'est Alexandra qui insuffle le plus de style et de cadence dans le duo, mais il s'agit bien d'un duo violon diato et le jeu d'Anne est tout à fait intéressant, tout en nuance le plus souvent comme celui d'Alexandra, ce qui n'a rien d'incompatible avec leur cadence déjà citée. Et puis, surtout, leur duo fonctionne parfaitement et elles savent varier les sonorité en alternant violon seul, sur bourdon d'accordéon ou au contraire sur main droite seule ce qui peut ménager de belles entrées de bassses, violon en accompagnement etc... Bref voilà de la belle ouvrage, avec un livret citant naturellement toutes les sources. Je regrette juste la pochette très impersonnelle style tapisserie des années 70...
http://www.aepem.com
Voir photos au Son Continu 2016 en apéro et sur la scène libre
Le suivant fin 2020 : "Zo !"
Alexandra Lacouchie : invitée sur Philippe Randonneix " Un tot pitit Bocin "
ainsi que très efficacement sur deux plages de Philipppe "Rando" Randonneix "Un instrument au artiste : La Chabrette"
Violons limousins "Ab'aqui paubres drolles" 1999
Invitée par le duo Brotto Lopez sur "Adiu Miladiu !"
ainsi que sur la dernière plage de leur CD avec Les Ogres de Barback "Quercy-Pontoise"